Contrairement à la France qui a instauré une loi interdisant l’obsolescence programmée, la Suisse ne connait rien de tel. Notre pays n’autorisant pas non plus les actions collectives permettant de regrouper les plaintes des consommateurs sur un cas particulier, les leviers pour faire bouger les fabricants sont rares. Dans le cas d’une tromperie avérée, il est possible d’invoquer la Loi contre la concurrence déloyale (LCD), mais pour la plupart des cas que rencontrent les consommateurs, les montants sont trop faibles pour qu’une procédure soit intéressante. L’obsolescence pourrait également constituer un défaut dans le cadre des règles relatives à la garantie dans le contrat de vente, mais il n’y a jamais eu de jurisprudence à ce sujet.
La Suisse a en revanche repris certaines dispositions rendant obligatoire la mise à disposition des pièces détachées pour certains appareils électroménagers. Les travaux menés par l’Union européenne dans le cadre de son plan d’action sur l’économie circulaire sont toutefois beaucoup plus ambitieux que ce que prévoit actuellement la Confédération.
Insuffisant mais en cours d’amélioration
La FRC estime que les bases légales ne sont pas suffisantes. Elle lutte donc d’une part pour que la législation autorise le regroupement de plaintes au moyen d’une action collective – une révision du Code de procédure civile à ce propos est en cours –, mais aussi pour que les conditions-cadres permettent d’améliorer l’offre disponible sur le marché. En ce sens, elle a soutenu ou est à l’origine du dépôt de nombreuses interventions parlementaires depuis 2017. Lesquelles demandent notamment de prolonger la garantie des objets à cinq ans, d’améliorer la disponibilité des pièces détachées ou la réparabilité des objets, ou encore d’annoncer et d’afficher la durée de vie des produits ou leur indice de réparabilité.
Bien que ces objets aient été, à quelque exceptions près, refusés ou liquidés faute d’être traités dans les deux ans impartis, deux révisions de la législation apportent des améliorations notables:
(1) En décembre 2023, le Parlement a décidé de réviser le droit de la garantie: il est prévu que le droit à la réparation revendiqué par la FRC soit intégré dans ce cadre, ce qui permettrait aux consommateurs qui le souhaitent de demander une réparation au lieu du remplacement ou du remboursement d’un objet défectueux.
(2) Un deuxième pas important en direction d’une économie circulaire et d’une offre plus transparente et durable pour les consommateurs a été franchi le 15 mars 2024, avec l’adoption par le Parlement de la révision de la Loi sur la protection de l’environnement (LPE) (initiative parlementaire 20.433).
Cette révision, en faveur de laquelle la FRC s’est fortement engagée, permet concrètement:
- au Conseil fédéral de mettre en place un indice de réparabilité et d’imposer des exigences pour la mise sur le marché de produits ou emballages en fonction de leur durée de vie, de la disponibilité des pièces de rechange ou de leur réparabilité (art. 35i LPE);
- à la réutilisation et à la réparation d’avoir désormais la priorité sur l’incinération, même si le recyclage reste malheureusement au même niveau (art. 7, al. 6bis et art. 30d LPE);
- au Conseil fédéral de soutenir financièrement les plateformes permettant de renforcer l’économie circulaire et donc les filières de la réparation et de la réutilisation (art. 49a LPE).
Certes, les dispositions les plus progressistes de cette loi restent hélas timides et non contraignantes. Le risque est donc grand que le Conseil fédéral ne fasse pas usage de ses nouvelles compétences, à l’instar de l’art. 30a, lettre a LPE dont il n’a jamais fait usage jusqu’ici et qui lui permettrait pourtant d’interdire certains objets à usage unique en cas de nuisance disproportionnée à l’environnement. Aux côtés des 21 autres organisations de la coalition « Longue vie à nos objets! », la FRC s’est battue pour que cet article devienne contraignant. En vain.
Malgré cela, la révision de la LPE peut être considérée comme une victoire et un réel progrès pour la durée de vie des objets. La FRC suit ce dossier de près et continuera de s’engager pour une mise en œuvre efficace de ces dispositions ainsi que sur le terrain.