Préparer sa mort en mode 2.0

Le droit des successions a changé au 1er janvier. Il donne plus de liberté à tout un chacun pour disposer de ses avoirs. Qui veut préserver ses proches, leur épargner autant que possible flous, complications et disputes, doit s’organiser. Car on peut anticiper à peu près toutes les questions pratiques qui se poseront le moment venu. Oui, mais comment le faire?

De nouveaux acteurs romands, Tooyoo et Everlife, se sont profilés sur le marché de la prévoyance décès où ils tentent de se faire une place en optant pour le virage digital.

La plateforme Everlife se définit comme «le premier écosystème de fin de vie en Suisse» qui promet «plus qu’une prévoyance funéraire». À peine plus sobre au Registre du commerce, la société fribourgeoise créée en 2020 présente son activité comme couvrant «toute prestation qui se rapporte à la planification de la vie, de la fin de vie ainsi qu’à la planification post-mortem».

S’aider d’une plateforme web, ce n’est pas faire un testament numérique. En cas de litige, seuls les documents respectant la loi sont valides.
Jean Tschopp, Resp. Service juridique

Catalogues variés
Elle offre de la prévoyance funéraire avec un abonnement mensuel dès 12 fr. 90. à cela s’ajoute un comparateur de prix allant jusqu’à quatre devis par prestation demandée. Cela couvre la création d’un coffre-fort numérique, la mise en place d’un espace d’hommages, le choix de l’entreprise de pompes funèbres partenaire, sans oublier l’organisation des obsèques.

Tooyoo intervient aussi dans ce type de planification. Le Registre du commerce indique toutefois que la société vaudoise étend son but, affiché sans détour, à l’acquisition, la détention, la gestion et la vente de participations dans des sociétés de tout type en Suisse ou à l’étranger. Sur la page d’accueil de Tooyoo, l’internaute est invité à «devenir un héros pour ses proches» en préparant «tout ce qui est important au cas où il arriverait quelque chose» en créant son compte en ligne.

Au catalogue, il y a les prestations destinées au «héros» pour répondre aux questions que les proches pourraient se poser: administration de la succession, organisation des funérailles, rédaction d’un testament ou de directives anticipées sur la base de modèles. Il y a aussi les services dédiés aux «gardiens des souhaits» désignés, qui se créent un compte pour accéder aux volontés du futur défunt.

Les offres de Tooyoo se concentrent sur des partenariats avec Visana, La Mobilière, Ylex (société de conseil juridique), Profond (caisse de pension) et Livica (prévoyance professionnelle). L’abonnement gratuit devient automatiquement payant après 30 jours et se renouvelle pour la durée convenue. Mais Tooyoo incite plutôt à conclure un abonnement à vie. Tout en se réservant «le droit de modifier ou d’ajuster en tout temps et sans fournir d’explications, offres et services» (art. 6 des conditions générales).

Ces acteurs digitaux ont l’avantage d’apporter un peu de lumière dans un domaine où la pudeur et la dimension affective rendent réticent à comparer des prestataires. Ces solutions présentent aussi l’intérêt d’offrir de la simplification en concentrant les informations au même endroit. Reste que les offres manquent d’indépendance, voire de transparence. En recevant des devis, le consommateur n’a en effet pas forcément en tête les accords de partenariat sous-jacents.

Pour en lire davantage :

• Faciliter la vie de ses proches 
• Legs et héritages
• Nouveau droit des successions 2023

Pesée d’intérêts

Une personne bien organisée peut constituer son dossier seule. Informer ses proches de ses volontés évite des malentendus. Puis il reste des démarches à effectuer pour les sécuriser. Certaines communes ont un service public de pompes funèbres avec des tarifs parfois plus intéressants que eux des entreprises privées. Une plateforme ou une société peut disparaître ou faire faillite. Le risque alors est de perdre tout ce qui a été préparé. Se pose aussi la question (au-delà des déclarations de confidentialité prévues par les plateformes) du sort des données personnelles sensibles qui leur ont été transmises. Seule une minorité de cantons soumet les entreprises privées de pompes funèbres à un régime d’autorisation. Vaud est un des rares à imposer un fonds indépendant pour garantir les prestations convenues.