31.5.2016, Laurianne Altwegg
Les Suisses renouvellent leur garde-robe tous les deux ans en moyenne et aiment offrir une deuxième vie à leurs vêtements usagés. Mais laquelle ?
Quand vient l’heure du tri, pas simple de savoir si le fait de déposer ses vêtements dans un conteneur est une réelle bonne action. A qui cela profite-t-il vraiment? nous demande un membre. Le geste soulage-t-il ceux qui en ont besoin? Oui, mais pas forcément comme le consommateur l’imagine. Dans certaines formules, les ONG ne profitent pas des habits mais du produit de leur vente pour leurs projets. Globalement, les grands perdants restent les industries du textile des pays pauvres qui souffrent de la concurrence de nos fringues sur leurs marchés.
DON À DES OEUVRES CARITATIVES
QUI | Les grossistes Texaid, Contex et Tell-Tex collectent 50 000 tonnes par an notamment via leurs conteneurs, acheminées vers un centre de tri en Suisse. Ils revendent la plupart des vêtements et reversent la majeure partie de leurs bénéfices à des organisations caritatives.
DEUXIÈME VIE | 65% sont revendus en Europe de l’Est, en Asie et en Afrique comme seconde main; 15% sont transformés en chiffons de nettoyage; 15% sont mélangés à d’autres matériaux pour produire des isolants notamment, et les 5% restants sont détruits. Peu de vêtements en bon état restent en Suisse, à l’exception de quelques pièces mises de côté en faveur de l’Aide Suisse aux Montagnards.
AVANTAGE CONSOMMATEUR | Il gagne du temps (collecte rapide) et contribue à financer des actions sociales puisque les oeuvres d’entraide bénéficient de cette manne financière.
L’objectif d’entraide locale n’est qu’indirectement atteint, hormis des initiatives comme celle de la Croix-Rouge fribourgeoise qui a mis en place sa propre filière. Privilégiez cette solution pour recycler un vêtement abîmé, mais pas pour ce qui est encore en bon état.
RETOUR EN MAGASIN CONTRE BON D’ACHAT
QUI | I:CO collecte, depuis 2013, des vêtements usagés auprès d’enseignes de prêt-à-porter (H&M, Vögele Shoes). Elle n’est affiliée à aucune oeuvre d’entraide à qui elle fait concurrence. Le tri s’opère ensuite en Allemagne.
DEUXIÈME VIE | Les textiles sont revendus et transformés en Europe comme chiffons ou rembourrage pour sièges automobiles.
AVANTAGE CONSOMMATEUR | Il gagne du temps, de l’argent… mais reste captif de ces enseignes qui en ont fait un business.
Cette solution lèse les oeuvres sociales qui pourraient bénéficier de ces dons et ne valorise pas les habits en bon état à leur juste valeur.
DON AUX BOUTIQUES DE SECONDE MAIN
QUI |De très nombreuses boutiques de seconde main existent en Suisse, dont beaucoup sont dédiées à des oeuvres sociales: le Centre Social Protestant, l’Armée du Salut ou les magasins Picpus de Textura (Vaud), Caritas, etc. Cette dernière offre par exemple des réductions aux personnes dans le besoin (aide sociale, AI, chômeurs) sur présentation d’une carte de légitimation. Trouvez un lieu proche de chez vous dans nos bonnes adresses textiles. Faites aussi don de vos vêtements sur les sites de petites annonces en ligne ou à l’occasion d’une gratiferia (marché gratuit).
DEUXIÈME VIE | Si les habits ne sont pas revendus, les boutiques se chargeront elles-mêmes de les confier à un grossiste. Dans le cas d’une gratiferia ou d’une annonce en ligne en revanche, chacun garde ses invendus…
AVANTAGE CONSOMMATEUR | Il ne gagne ni temps ni argent, mais a la liberté de choisir à qui offrir ses vêtements.
La FRC recommande cette solution pour les habits en bon état. De cette manière, le don bénéficie directement à l’organisation de son choix qui touchera davantage qu’en étant affiliée à un grossiste, ainsi qu’aux personnes nécessiteuses qui ont accès à des habits de qualité à moindre coût. Le tout, sans intermédiaire ni transport inutile. En outre, cette solution permet de s’assurer que les vêtements auxquels on tient ne finiront pas en chiffons. Opter pour les boutiques de seconde main, c’est aussi participer à la création d’emplois locaux.
REVENTE
QUI |Boutiques de dépôt-vente, vide-dressing, bourses-échanges, sites d’enchères en ligne, petites annonces. Autant d’options pour confier ses vêtements usagés de qualité ou s’atteler soi-même à leur revente. La FRC participe à ce mouvement depuis une trentaine d’années avec ses Bourses aux habits, à repérer dans l’agenda.
AVANTAGE CONSOMMATEUR | Il gagne de l’argent mais la revente demande du temps et de l’organisation.
Cette solution est intéressante pour les habits auxquels on est attaché. Eux non plus ne finiront pas en chiffons. La vente en direct permet de rencontrer la personne qui lui offrira une deuxième vie, et de tirer un revenu de vêtements qui ont été onéreux à l’achat. Les perdants de cette formule restent les oeuvres d’entraide et leurs bénéficiaires, mis à l’écart de cette filière.
Uniquement pour les habits très sales, car même abîmés ils servent encore sous forme de chiffons de nettoyage. La matière première et toutes les ressources nécessaires à la fabrication d’un simple T-shirt en coton sont bien trop précieuses pour être simplement incinérées. La chaleur et l’électricité valent peu de chose face à l’eau et aux produits chimiques utilisés, ainsi qu’aux kilomètres parcourus.