10.9.2024, Lionel Cretegny et Rebecca Eggenberger / Crédit photo: Jean-Luc Barmaverain
Du soja, des noix de coco ou de cajou à la place du lait? Le choix est bien souvent onéreux. Et nutritionnellement, l'option n'est pas si simple à envisager. Enfin, produits laitiers et alternatives ont des impacts environnementaux peu comparables. Seul le critère du bien-être animal fait clairement pencher en faveur des secondes.
En Suisse, les produits laitiers sont une forme de tradition et constituent pour beaucoup une part incontournable de l’alimentation. Toutefois, certains consommateurs souhaitent se passer de produits d’origine animale, pour leur santé, par conviction ou souci de durabilité. Pléthore de fabricants ont flairé le filon et s’y sont engouffrés. L’offre n’a cessé d’augmenter, arborant des emballages évocateurs laissant aussi croire parfois à une ressemblance assurée avec le goût du produit laitier «imité». Sans parler de l’investissement massif des industriels à trouver des noms de marque attirants, tels que V-Love, Karma ou Simply V.
Interrogés, Migros, Coop, Aldi, Lidl et Manor indiquent viser tant les clients ayant adopté un régime vegan que ceux qui souhaitent réduire leur apport en protéines animales. Migros et Manor constatent qu’après un fort développement, leur marché se stabilise. Aldi, Coop et Lidl disent au contraire élargir constamment leurs gammes végétariennes et vegan face à une demande grandissante. Aldi et Lidl précisent «profiter de moments tels que le Veganuary ou le Vemondo afin de proposer des découvertes gustatives».
La crème V-Love (Migros) contient onze ingrédients, dont trois déconseillés pour une utilisation régulière.
La composition de ces substituts a éveillé la curiosité de la FRC: sont-ils plus sains et plus durables? Quelle est leur qualité nutritionnelle par rapport aux produits d’origine animale? Nous avons retenu une quarantaine de produits: fromages frais, à pâte dure ou en tranches, beurres, crèmes et yoghourts (fiches ci-dessous). Un produit laitier de référence a également été analysé pour chaque famille, afin de faciliter la comparaison. La lecture d’étiquette montre que les fabricants remplacent le lait par différentes graines (soja, noix de coco, noix de cajou) et huiles végétales. Pour leur donner une consistance, ils ajoutent des additifs: épaississants, émulsifiants, voire arômes et colorants. Une fois qu’on dénombre les ingrédients industriels, la quantité de sel et d’acides gras saturés ainsi que la présence d’additifs déconseillés, on a parfois la nausée…
«La lecture d’étiquette a montré l’absence de code E, marqueur d’un additif. Le terme «amidon modifié» éveille moins de soupçons qu’E1440.» Lionel Cretegny, responsable Tests comparatifs
D’un point de vue nutritionnel, ces alternatives ne constituent pas à elles seules un remplacement 1:1 du produit laitier initial auxquelles elles prétendent se substituer. Certaines apportent d’autres types de nutriments, mais il faut aller chercher ailleurs ceux qui font défaut afin d’équilibrer son alimentation. Prenons un exemple: le lait de vache est riche en protéines et contient calcium, potassium et phosphore, essentiels à la bonne santé des os et à la prévention de l’ostéoporose. En comparaison, les noix de cajou contiennent beaucoup moins de protéines et de vitamines essentielles telles que la D et la B12, mais sont riches en fer, zinc, fibres et bonnes graisses. Mais le fait d’ajouter de l’amidon modifié et des huiles végétales (coco ou palme) qui ont une part importante d’acides gras saturés rend certains substituts peu recommandables.
«D’un point de vue nutritionnel, ces alternatives ne constituent pas à elles seules un remplacement 1:1 du produit laitier initial.» Rebecca Eggenberger, responsable Alimentation
Que l’on souhaite se tourner vers ces alternatives de manière pérenne ou pour varier ses menus, la FRC conseille de bien lire les étiquettes afin de décrypter les apports nutritionnels et d’équilibrer le reste de l’assiette en conséquence.
Et même la lecture apporte son lot de surprises. Ainsi, sur les produits analysés, aucun ingrédient n’est codé avec un «E», signe annonçant un additif. Pourtant, ils sont bien là. Par exemple, l’E1440 est indiqué par son nom courant, amidon modifié, et éveille de cette manière moins de soupçons.
Le Naturali Organic Bloc (Coop), alternative au beurre, contient un taux d’acides gras saturés de 39% qui place ce critère dans le rouge.
Il reste tout à fait possible de trouver les nutriments dont le corps a besoin dans une alimentation végétarienne (ndlr: correction, initialement «basée uniquement sur des produits végétaux»), mais il s’agit de la penser dans sa globalité et pas uniquement de substituer un produit laitier par l’alternative vegan proposée juste à côté en rayon.