26.4.2010
"Ne jouez pas avec le feu, car à défaut de paiement vous serez inscrit en tant que mauvais payeur, ce qui vous privera de tout nouvel abonnement de téléphonie mobile ou de leasing pour une voiture!" S'agit-il d'une mauvaise blague? Pas du tout! Il s'agit en fait d'un extrait d'un courrier envoyé à Antoine M. de la part d'une société de recouvrement.
Mais de quelle inscription parle-t-on? Si l’on ne paie pas à temps risque-t-on réellement de figurer sur une liste épinglant les soi-disant mauvais payeurs ? La réponse est oui et cela même s’il s’agit d’un malentendu, comme ce fut le cas pour Dorette Paroz de Marin qui suite à une erreur de comptabilité de la société de leasing, s’est vue refuser ultérieurement l’octroi d’une carte de crédit. Son nom a été en effet inscrit dans un registre répertoriant les mauvais payeurs. Ce n’est pas Bruno R. de Bienne qui dira le contraire, car il n’a pas pu, à son grand étonnement, conclure une transaction dans le magasin Speedy Cash à Bienne, pour la même raison.
Deux centres d’informations de crédit
Il n’y a pas que les bureaux de recouvrement et le registre des poursuites qui disposent d’informations sur vos habitudes de paiement. Vos bonnes ou mauvaises habitudes sont aussi consignées ailleurs, notamment dans le fameux registre des mauvais payeurs, plus connu sous l’appellation ZEK. Il émane de l’Association pour la gestion d’une centrale d’information de crédit et existe depuis 1968. A ne pas confondre avec le centre de renseignement sur le crédit à la consommation, l’IKO créé en 2002 suite à l’entrée en vigueur de la loi sur le crédit à la consommation (LCC). Notons que les deux registrent fonctionnent en parallèle. Ils comprennent tous deux des indications sur le débiteur, mais aussi des données sur le genre de la dette, la date à laquelle la dette remonte et le montant. Les indications émanent notamment des banques ou des entreprises des cartes de crédit. L’IKO a toutefois une portée plus limitée, car il ne peut contenir que les informations requises par la LCC lors de l’examen de la capacité de crédit et n’est accessible qu’aux prêteurs soumis à cette loi.
Le registre ZEK contient quant à lui les informations positives ou négatives de solvabilité provenant des activités de crédits des foyers privés. L’accès, plus étendu que celui de l’IKO, est réservé aux membres autorisés du secteur des prestations de service financières.
Les contrats de crédit pratiqués aujourd’hui prévoient généralement que ces deux centres seront consultés puisque tout prêteur soumis à la LCC doit vérifier que le consommateur a la capacité de contracter un crédit. Relevons qu’il existe des sanctions dissuasives si le prêteur ne respecte pas ce contrôle obligatoire: cela va de la perte de la totalité du crédit consenti (avec intérêt et frais) pour les cas graves, à la perte des intérêts et des frais du crédit pour les cas légers. Dans ce dernier cas, il conserve le droit au capital. Vous comprendrez dès lors mieux pourquoi, à la conclusion d’un contrat, beaucoup d’informations personnelles vous sont demandées.
Et la protection des données?
Un prêteur consultera le ZEK pour s’informer de la solvabilité des demandeurs et bénéficiaires de crédits à la consommation, de leasings de biens de consommation et des cartes de crédit s’il en a besoin pour conclure un contrat avec le titulaire. L’émetteur peut communiquer votre nom au ZEK s’il y a eu un blocage de la carte, s’il y a des arriérés de paiement ou une utilisation abusive de la carte. Les registre ZEK et IKO donnant des indications sur le débiteur, le genre, la date et le montant de la dette, ils s’engagent à respecter les exigences de la loi sur la protection des données (LPD) (cf. encadré 1). Toutes les données enregistrées doivent être exactes et les membres du fichier en sont responsables. Leur accessibilité est limitée aux membres des associations concernées. Il est en outre formellement interdit d’utiliser ces données à des fins marketing et d’envoyer une récapitulation sommaire des mauvais payeurs. Les services du préposé à la protection des données précise que la consultation ne doit être possible qu’au cas par cas.
Le traitement de données personnelles est licite si :
- Il y a eu consentement
- Il existe un intérêt public ou privé prépondérant de la part du maître du fichier
- La loi le prévoit
Pendant combien de temps les données peuvent être conservées ?
La loi ne précise pas la durée de conservation des données, la seule ligne directrice étant le principe de proportionnalité :
Délai à compter de la survenance du fait | Délai à compter du retour à la normale | |
Demande de crédit en suspens | 3 mois | |
Contrat soldé avec perte même partielle | 5 ans | |
Demande de crédit rejetée | 2 ans | |
Demande de carte rejetée | 3 ans | 6 mois |
Carte bancaire bloquée | 1 an | 6 mois |
Cartes bloquées | 5 ans | 2 ans |
Mesures de recouvrement en cours ou acte de défaut de biens établis | 10 ans | 3 ans |
Lieu de résidence inconnu du titulaire | 10 ans | 6 mois |
Abus commis par le titulaire de la carte | 10 ans | 3 ans |
Problèmes liés au contractant | 5 ans | 2 ans |
Conseil FRC
Toute personne peut demander au ZEK un extrait des données la concernant et en demander la rectification, voire la suppression en cas de données erronées (cf. bonus web pour lettres et formulaires utiles).
Lorsqu’un client a conclu plusieurs contrats de suite en ayant une bonne solvabilité, seules les données relatives au dernier contrat conclu peuvent être conservées. Si la société les utilise au-delà du délai autorisé, il faut en demander la destruction immédiate, en cas de refus saisir le juge civil.