5.12.2017, Anne Onidi
Un étiquetage faux ou lacunaire peut avoir de lourdes conséquences. Démonstration.
Dans la trousse de secours des maux hivernaux, l’aromathérapie occupe une place de choix comme alternative à certaines médications. Particulièrement aimée des familles avec petits enfants, l’huile essentielle d’Eucalyptus radiata (lire encadré) convient à tous les âges et à des utilisations variées mais se commercialise à des prix contrastés. Des flacons à 300 francs ou à 2000 francs le litre cachent-ils des différences de qualité? Pour le savoir, nous avons confié à un laboratoire huit huiles essentielles d’Eucalyptus radiata achetées en pharmacies (spécialisées ou non dans les médecines naturelles), dans les grandes surfaces et sur internet.
Les huiles essentielles (HE) sont composées de centaines de substances actives. En mettant en évidence les composés les plus représentés, notre laboratoire a pu confirmer que sept huiles ne présentent pas de différences significatives et répondent à ce qu’on peut attendre de cette variété d’HE. La huitième, l’huile Swiss Made 80/85 vendue chez Manor, offre, elle, un profil singulier. Comme elle était exposée au rayon des diffuseurs d’huiles essentielles, nous l’avons achetée en pensant avoir affaire à de l’Eucalyptus radiata, variété la plus fréquemment employée de cette manière. Mais les résultats d’analyses laissent plutôt penser à de l’Eucalyptus globulus, qui, lui, est contre-indiqué en diffusion. Une recherche sur internet le confirme: la dénomination «80/85» désigne bien la variété globulus. Mais comment le profane pourrait-il en avoir connaissance?
Le client en quête d’informations peut effectivement trouver une indication complémentaire sur l’emballage du produit, où l’appellation Eucalyptus citriodora est donnée. Le problème, c’est que le flacon ne contient en tout cas pas du citriodora, reconnaissable entre tous par son parfum et sa composition caractéristiques. Informé de nos résultats, Elixan, le fabricant de ce produit, a identifié un problème d’étiquetage, et promet de corriger le tir. En attendant, Manor a retiré le produit de ses rayons. Parce qu’elle est susceptible de mettre en danger les jeunes utilisateurs, nous avons pénalisé cette huile mal étiquetée. Cet exemple met bien en évidence l’importance cruciale d’un étiquetage rigoureux, dans lequel le nom latin de l’espèce doit figurer clairement. Ce point ne pose d’ailleurs pas problème dans les autres échantillons testés, où le nom Eucalyptus radiata figure clairement sur le produit. Restent d’autres lacunes, que nous avons observées en analysant les emballages en détail.
Pas de loupe, pas de bol
Les consignes de sécurité, par exemple, manquent sur les produits Aroma-zone et Ariès. Par ailleurs, les flacons de ces deux huiles ne comportent pas de symboles de danger, tandis que celui de la marque Gedane fait figurer un symbole périmé depuis mi-2017. Pour ce dernier, les notes de sécurité en deux langues couvrent à peine deux centimètres carrés, avec des caractères impossibles à déchiffrer sans loupe. A quoi bon les inscrire, alors?
Presque toutes les marques de notre sélection se revendiquent comme biologiques. Mais les fabricants sont-ils capables de fournir la preuve que les flacons sont exempts de pesticides? C’est la question que nous leur avons posée par écrit. Rois de la réactivité, les producteurs des huiles Nabio, Aromasan et Ariès nous ont livré des informations de qualité. Aromalife a reconnu faire simplement confiance à son fournisseur, mais envisage de demander une meilleure traçabilité. Quant aux autres, ils ont parfois tardé à donner suite à notre message. Dommage, car cette question légitime, tout consommateur pourrait la poser!