28.3.2024, Yannis Papadaniel
Ceux qui se rendent chez leur médecin savent que chaque visite vient alimenter leur dossier médical, dont l’épaisseur est proportionnelle au nombre de visites et à leur état de santé. Ces documents sont stockés dans les fichiers informatiques, éventuellement dans des dossiers suspendus d’un cabinet, d’un hôpital ou d’un service. Le dossier médical fait l’objet de questions récurrentes. Nous y répondons ici.
Dossier papier, dossier informatique, dossier électronique?
Les trois sont possibles. Les professionnels de la santé sont en tous les cas obligés d’archiver l’ensemble des pièces médicales (diagnostics, résultats d’examens, analyses, rapports d’interventions) produites au sujet d’un patient. Elles peuvent être stockées en format papier ou informatisées. Attention, le dossier informatisé du patient n’est pas l’équivalent du dossier électronique du patient. Informatisé signale simplement que la saisie et le stockage de vos données sont effectués par votre médecin – à l’aide de logiciels spécifiquement conçus à cet effet – à partir de son ordinateur, d’un serveur et/ou d’un cloud.
Ai-je le droit d’accéder à mon dossier?
Oui. À tout moment, le patient a le droit de prendre connaissance des pièces qui figurent dans son dossier. Il peut demander une copie de son dossier à son médecin, qui est obligé de la lui remettre. Cette prestation est gratuite. Seule la mise en ordre d’un dossier particulièrement complexe peut être facturée, mais il s’agit là d’une exception. Il se peut que, pour la bonne tenue du dossier ou dans des moments de réflexion, le médecin y ait adjoint des notes personnelles – sorte de pense-bête. Ces notes personnelles lui appartiennent et il ne les transmet pas au moment de la remise du dossier. Les notes personnelles sont définies en fonction de leur contenu. À ce titre, des informations manuscrites ne sont pas nécessairement considérées comme des notes personnelles. Lorsqu’un professionnel estime que la situation d’un patient est grave ou sensible, il peut proposer que la consultation du dossier se fasse en sa présence (notamment pour ne pas abandonner les patients à leur sort face à un diagnostic ou des informations défavorables).
Jusqu’à quand mon dossier doit-il être conservé?
Dix ans après le dernier complément apporté au dossier. À compter de cette période, un cabinet est en droit de détruire le dossier. Il doit le faire de manière sécurisée. Les données de santé sont des données sensibles qui, selon la nouvelle Loi sur la protection des données, requièrent une attention accrue de la part des organismes qui les stockent. En ce sens, un établissement ou un cabinet doit pouvoir démontrer qu’il œuvre à leur protection.
Qui peut avoir accès à mon dossier?
Il faut préciser qu’en l’état actuel du système de santé, les établissements de soins et les professionnels n’ont pas d’accès à un dossier unique concernant le patient (voir ci-dessous question sur dossier électronique du patient). En pratique, des dossiers sont ouverts puis archivés dans des institutions ou des services en fonction du parcours de soin. Un même patient peut ainsi avoir plusieurs dossiers à son nom. Pour chacun de ses dossiers, l’accès aux informations est autorisé à tout professionnel rattaché à l’institution, au service ou à l’unité, pour autant qu’il soit impliqué dans la prise en charge. Chaque unité/institution doit veiller à ce que seuls les membres autorisés de leur personnel aient accès aux informations pertinentes. L’information entre cabinets circule selon la même logique. Dans tous les autres cas, par exemple dans le cadre d’une transmission d’information à un médecin-conseil employé par une assurance, l’autorisation doit être formellement demandée au patient.
Après le décès d’une personne, à qui appartient son dossier médical?
Toujours au patient, le dossier reste protégé par le secret professionnel. Les proches peuvent avoir accès à quelques informations pour autant que le professionnel soit autorisé à le faire. Le secret professionnel médical est régi par le Code pénal ainsi que par des lois et des réglementations cantonales. Les circonstances dans lesquelles un médecin peut être délié du secret professionnel sont définies dans ces textes et selon les circonstances. Par exemple, des conditions suspectes lors d’un décès peuvent faciliter l’accès par des tiers à un dossier médical et une partie de son contenu.
Ai-je le droit de transmettre des informations de mon propre chef?
Bien sûr, le patient a toute autorité pour transmettre les informations de son choix à des proches et, plus généralement, à des tiers.
Le cabinet médical que je consulte change de main, le nouveau médecin a-t-il automatiquement accès à mon dossier?
En dehors des situations d’urgence vitale ou d’une obligation légale, l’accès au dossier par le nouvel arrivé est soumis au consentement du patient.
Et le dossier électronique du patient?
Longue et difficile histoire! Le dossier électronique du patient (DEP) recèle un magnifique potentiel puisqu’il doit précisément offrir un point d’accès unique sous la forme d’un dossier réunissant l’ensemble des informations médicales. Il a également le grand avantage d’être en possession directe des patients. Légalement, ces derniers peuvent même décider qui peut y accéder et quelles pièces sont visibles par les professionnels: trois niveaux de confidentialité sont ainsi prévus dans la loi. Malheureusement, l’outil se déploie de manière trop morcelée et les médecins indépendants n’ont pas l’obligation de s’y connecter et d’y verser les pièces médicales. Dans des pays comme le Danemark, le DEP a été mis en place il y a vingt ans.
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