Séminaire FRC

La Suisse est-elle prête pour l'action collective?

L’affaire Lehman Brothers ou l’annulation du concert de Prince ont démontré le manque criant d'une procédure d'action collective en Suisse. Un thème auquel la FRC a consacré son premier séminaire d'études juridiques, avec la ZHAW School of Management and Law et Weblaw.ch. Résumé des débats.
Droit et contrats

Archive · 18 octobre 2012

Photo: Sébastien Féval

L’affaire Lehman Brothers ou l’annulation du concert de Prince ont démontré à quel point les consommateurs suisses sont dépourvus de mécanisme juridique leur permettant d’agir ensemble. Or, va-t-on en justice si la somme litigieuse paraît faible comparée au risque du procès? C'est là qu'intervient l'action collective, et c'est le sujet du premier séminaire d'études juridiques organisé par la FRC, en collaboration avec la ZHAW School of Management and Law et Weblaw.ch. Il a eu lieu devant une salle comble le 9 octobre dernier à Lausanne. Résumé d'une très riche après-midi.

Devant un parterre de professeurs en droit, avocats ou représentants des administrations publiques, cinq orateurs sont intervenus pour parler de l'action collective, appelée aussi action de groupe ou "class action". Petit rappel : l’action de groupe est la possibilité d’agir devant un tribunal de manière collective pour un groupe de victimes lésées par un même commerçant ou prestataires de services.

Monique Goyens, directrice du BEUC (Bureau européen des unions de consommateurs), notre association faîtière en Europe, a fait le point de la situation dans l’UE, puisque 16 Etats membres connaissent déjà ce modèle procédural. Une des craintes principales est que la possibilité d’agir collectivement provoque une avalanche de plaintes, et engendre des faillites d’entreprises. Or, les différents systèmes mis en place chez nos voisins n’ont pas engendré de si nombreuses procédures. Par exemple, au Portugal où le système a été mis en place il y a une quinzaine d’années et qui est un modèle qui fonctionne bien, il n’y a eu qu’une dizaine d’actions collectives aboutissant toutes à un succès pour les plaignants.

Le point de vue des autorités de la concurrence a été amené par Olivier Schaller, vice-directeur à la Commission de la concurrence (COMCO). En effet, dans le domaine des cartels, l’introduction d’une action collective pourrait permettre un meilleur accès à la justice pour les victimes de restrictions à la concurrence. Par contre, elle risquerait de remettre en question les programmes de clémence (amnistie pour une entreprise qui dénonce un cartel), qui permettent de découvrir une entente sur les prix et de ralentir la procédure administrative.

Voix discordante dans le débat, les entreprises étaient représentées par Jean-Hugues Busslinger, directeur du département de la politique générale du Centre patronal. En effet, les patrons craignent que la mise en place d’une action de groupe suscite un lot de procédures abusives. Ils considèrent que le droit actuel permet déjà d’agir collectivement, notamment par le biais de la consorité.

Patrick Krauskopf, avocat et professeur à la ZHAW School of Management and Law,  a présenté le système américain en démontrant, avec quelques exemples-clés, que l’introduction d’une class action à l’américaine en Suisse n’était pas souhaitable telle quelle. Mais que le droit suisse actuel doit répondre aux questions de société qui se posent, notamment sur la réparation du tort moral. En outre, il faudra différencier l’action collective, qui peut aussi bénéficier aux PME, du droit de recours des associations.

Des exemples concrets nous ont été apportés par Pierre Bos, avocat à la Haye aux Pays-Bas, qui utilise fréquemment l’institution de l’action de groupe dans sa pratique. Pour lui, c’est la culture juridique d’Europe continentale qui doit évoluer : alors même que certains Etats disposent d’outils intéressants, notamment pour la recherche de preuves, ceux-ci ne sont que peu utilisés. De même, la lenteur et la complexité des procédures en Europe devraient être améliorées.

En conclusion, il est évident que la discussion sur l'action collective en Suisse n'en est qu'à un stade préliminaire, mais l'on peut déjà constater ce qui suit:

  • il manque un moyen procédural d'action collective pour un groupe de victimes lésées par une même entreprise dans un cas similaire.
  • l'action collective doit avoir un but d'efficacité, pour réduire les lenteurs d'une procédure multiple.
  • cela permettrait de réduire les frais de justice, bien souvent trop onéreux, pour se lancer dans une procédure judiciaire, lorsque le montant litigieux n'est pas si élevé.
  • l'action collective aurait également une vertu de prévention à à l'égard des entreprises.
  • elle doit non seulement servir aux consommateurs, mais également à d'autres cercles, par exemple aux assurés, ou encore aux PME.

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