8.10.2019, Photos: Jean-Luc Barmaverain
Le marché des soins anti-acné est impressionnant. Entre routine idéale, prix et substances indésirables, comment l’adolescent peut-il s’y retrouver? Quels produits? Quand consulter?
Crème de jour et de nuit, hydratante ou BB, eau micellaire, gommage, peeling, gel exfoliant ou nettoyant, lotion, tonique, mousse, strips, pads, sticks, masques… Il y a de quoi perdre son latin devant tant d’options pour soigner son visage, de quoi y claquer pas mal d’argent aussi. Pour corriger de légères imperfections, pourquoi pas, mais pour que les boutons s’éclipsent, c’est une autre histoire! Se débarrasser d’une peau à tendance acnéique n’est pas si simple.
A cet âge délicat où parler de l’image qu’on a de soi est gênant, les jeunes se retrouvent facilement désemparés et manquent cruellement d’informations sur ce qu’ils doivent véritablement appliquer sur leur visage. Zélie, 15 ans, le reconnaît: «Au début, j’avais juste pris deux petits trucs chez Migros», se fiant aux prix, à la publicité, au bouche-à-oreille aussi. Mais cela n’a pas eu d’effet salvateur. «En vérité, on ne sait pas du tout ce qui nous convient», lâche-t-elle. Normal. Dans les grandes surfaces, les jeunes sont simplement livrés à eux-mêmes. Exception faite chez Migros Métropole Lausanne, où une conseillère en beauté est, depuis quelques mois, à la disposition de la clientèle. «C’est l’adulte qui m’a posé le plus de questions, et au final, elle ne m’a pas proposé les produits les plus chers», se réjouit Zélie, qui s’est improvisée enquêtrice d’un jour pour la FRC.
Dans les magasins spécialisés, tels que Lush ou Body Shop très prisés des adolescents, on espérerait un tel retour, voire plus. Il n’en est rien. «On nous indique le coin acné, et on doit se débrouiller. Tout au plus, on nous demande quel type de peau on a, si l’on utilise déjà quelque chose», relate Zélie. A contrario, Yves Rocher et Clinique se sont attardés plus longuement sur la personne, proposant des produits en adéquation avec la sévérité du problème, le second offrant même quelques échantillons. Le hic: des prix bien trop inabordables pour le porte-monnaie d’un jeune. Et pour un résultat hypothétique, comme le souligne Livio, 14 ans. «On nous propose des crèmes, des savons, des masques, mais il faudrait pouvoir voir l’effet que cela fait sur notre peau.» Lui préfère se référer à ce que sa mère achète, selon les recommandations du médecin. Il ajoute que s’il devait trouver des informations par lui-même, il se renseignerait en pharmacie.
Bon réflexe? Les deux filiales visitées – une Sun Store et une Amavita – n’ont pas été à la hauteur des espérances de nos deux jeunes. «Je m’attendais à plus de questions de leur part, on m’a simplement demandé si j’avais déjà une crème et ce que je recherchais… Rien à propos de ce que je mangeais ou depuis quand j’avais des boutons», fait remarquer Zélie.
Insister pour se faire conseiller
Interrogées en amont par la FRC, la Pharmacie du Flon à Lausanne et celle du Galicien à Prilly (VD) recommandent pourtant de venir s’informer auprès d’une officine. «Nous sommes là pour les conseiller, les aider, souligne Juliette Joubert, pharmacienne au Flon. Nous connaissons toutes les typologies et pouvons effectuer le triage pharmaceutique.» Soit observer la personne, déterminer la gravité de l’acné, l’interroger sur son alimentation, le sport, les précédents traitements, l’impact psychologique, etc., en vue de sélectionner la solution la plus adaptée. Tant de questions auxquelles des jeunes ne peuvent répondre eux-mêmes, et malheureusement zappées par certains professionnels… «C’est pourtant l’étape cruciale à soigner puisqu’il arrive un stade où les cosmétiques ne suffisent plus et qu’il s’agit alors d’orienter vers un dermatologue pour une prise en charge plus conséquente», souligne Alexandre Lo Russo de la Pharmacie du Galicien. Et d’ajouter: «Tout jeune est bienvenu chez nous avec son savon ou sa crème, même achetés ailleurs, afin de recueillir un avis professionnel.» De quoi se rassurer sur sa routine (lire encadré) ou de passer à un traitement plus adéquat. L’idéal étant finalement, comme le résume Zélie, «de trouver son produit à soi».
Marjorie Winkler, directrice de l’association Ciao, dont le site informe et soutient les adolescents, ne dit pas autre chose: les jeunes ne devraient pas avoir peur de poser des questions. «Ils abordent parfois le sujet de l’acné lorsqu’ils évoquent des problèmes d’acceptation du corps, mais n’osent pas demander frontalement. Depuis l’arrivée des tutos beauté, on a observé un changement, on a moins de questions. Pourtant, seuls des professionnels sauront orienter au mieux, et sans jugement de valeur.»