31.3.2015, Laurence Julliard / Photo: Jean-Luc Barmaverain
Lorsque vous montez en voiture avec un conducteur Uber Pop, comment êtes-vous couvert? Quelques pistes.
Porté aux nues par certains, cloué au pilori par d’autres, Uber fait parler de lui comme jamais ne l’ont fait E-covoiturage et Tooxme, d’autres alternatives à la mobilité traditionnelle en milieu urbain. En Suisse, on trouve trois déclinaisons d’Uber: X et Black à Genève, Pop à Zurich, à Bâle et à Lausanne. Cette dernière formule s’apparente à du covoiturage, des particuliers vous véhiculant à la demande. Pratique, économique pour le passager. Mais qu’en est-il de sa sécurité?
La FRC s’est plongée dans les conditions générales d’Uber pour évaluer si ses prestations et ses obligations sont claires. «La société fait preuve d’une attitude par trop légère dans bon nombre de situations», résume Florence Bettschart, avocate à la FRC. «Souvenez-vous que le chauffeur et le passager prennent tous les risques si quelque chose tourne mal», renchérit Dominique Charmillot, avocat auprès des assurances du TCS.
Uber, une simple courroie de transmission?
Conducteurs et passagers sont des utilisateurs de la plate-forme uber.com, rappelle la firme américaine. Cette dernière ne se définit pas comme une entreprise de transport, mais comme un simple intermédiaire entre deux particuliers. La nuance n’est pas forcément claire pour le consommateur au moment où il commande sa course: il n’est pas lié contractuellement avec Uber, mais avec le chauffeur. Il monte ainsi dans une voiture comme s’il faisait de l’auto-stop, à la différence près que la prestation est tarifée.
Comment Uber choisit-il ses chauffeurs?
«Chaque chauffeur, avant de débuter son activité, rencontre un membre de l’équipe Uber en Suisse, et suit ensuite une formation», rappelle Thomas Meister. Laquelle, on ne le sait pas avec précision. Et le responsable de la communication d’ajouter que le conducteur doit disposer d’un casier judiciaire vierge, d’un permis de conduire depuis plus de trois ans et d’un véhicule de moins de dix ans. Aucun examen médical (de la vue par exemple) n’est exigé, pas plus qu’un examen sur la topographie.
Quelle couverture pour le passager en cas d’accident?
Les conducteurs Pop disposent d’une assurance privée, couvrant le véhicule, leur personne et les passagers ou tout autre tiers touché, affirme Uber, qui assure le «vérifier précautionneusement» et dispose d’une RC commerciale, plafonnée à 3,5 millions de francs, qui peut être activée à titre principal ou complémentaire. Le conducteur est responsable d’annoncer son activité chez Uber à son assureur. Certains prévoient le remboursement de prestations lors de courses payantes, d’autres se retourneront contre le conducteur. Allianz rassure sur un point: «Tout un chacun est couvert pour les frais de guérison par son assurance-accident».
Le chauffeur n’a pas de siège enfant?
La directive Uber est simple: une personne par ceinture de sécurité. Impossible de savoir au préalable si le véhicule sera équipé d’un siège adapté (jusqu’à une taille de 150 cm ou l’âge de 12 ans). «Le chauffeur devrait refuser la course pour ne pas se mettre hors la loi, souligne Florence Bettschart. En montant dans la voiture malgré tout, le parent prend sa part de responsabilité, surtout en cas d’accident». Mieux vaut privilégier d’emblée un taxi conventionnel, qui a l’obligation d’avoir au moins un réhausseur par véhicule.
Le conducteur est-il frais et dispos?
Les voitures privées ne sont pas équipées pour contrôler les temps de pause et les jours de repos. «Uber Pop est une activité de complément», souligne Thomas Meister, chargé de la communication pour l’Europe. Plusieurs chauffeurs, sans emploi, ont pourtant affirmé le contraire à la FRC. «Compte tenu de la faiblesse des rémunérations (80% de la course), la tentation de cumuler les heures n’est pas exclue», assure Florence Bettschart, qui estime que les accès des conducteurs à l’application devraient être restreints au-delà d’une durée de service donnée. Outre les heures de service, Nicole Favre, directrice de TaxiServices à Lausanne, évoque un autre problème, l’alcool: «Pour un chauffeur professionnel, la tolérance est à zéro; le particulier peut encore prendre le volant jusqu’à 0,5 pour mille.»
En cas de litige avec un conducteur, où s’adresser?
Vous n’avez pas d’instance pour régler les litiges administratifs, comme c’est le cas des compagnies de taxi officielles. Les voies de fait doivent être signalées à la police. Comme dans toute économie de partage, chaque course est doublement évaluée. Uber compte sur cette «autorégulation» entre passagers et conducteurs pour faire le tri.
Un ado de 17 ans peut-il commander un taxi?
En créant son compte, le détenteur affirme être majeur, mais aucune preuve n’est exigée de lui. Que la course se règle par carte de crédit est un garde-fou suffisant, selon Uber, qui reporte la responsabilité sur l’utilisateur. Or, la réalité est moins simple, car un jeune peut très bien disposer d’une carte de crédit prépayée. S’il doute, le conducteur devrait demander l’âge au jeune avant de le prendre en charge. «Si vous mettez votre baby-sitter mineure dans un véhicule Pop et qu’un incident grave survenait, précise encore Dominique Charmillot, on pourrait aussi vous reprocher d’avoir violé votre devoir de protection et de sécurité.»