4.6.2019, Texte et photos: Aude Haenni
De la création à la vente, la FRC a suivi le quotidien d’un artisan. Reportage gourmand sur deux jours intenses!
A écouter des glaciers s’exprimer sur leur vision de l’artisanal, c’est une entreprise à taille humaine, des ingrédients si possible locaux et non transformés, une production sur site, un suivi de A à Z. Des critères essentiels pour la FRC, qui déplore que rien ne figure dans la législation. «On trouve de tout sur le marché, souligne François Lador, de Loom Gelateria. Ce qui n’est gratifiant ni pour la profession ni pour l’artisan qui s’applique à respecter certaines règles.» Vécu chez Oh Gelato.
09:29 | La journée débute à Pampigny (VD), où Christophe Arnoux récupère sa commande de crème et de lait AOP de la Gruyère. Donnant-donnant, Julien Roy a disposé un congélateur dans sa laiterie. «C’est la première fois que nous vendons des glaces. Vu qu’elles sont faites avec du lait d’ici, les clients jouent le jeu!» Pas le temps de s’éterniser, rapide crochet par le grossiste pour un kilo de basilic qui sera associé au sorbet prévu pour la Fête de la Fraise.
10:47 | Dans son laboratoire de Tolochenaz, l’artisan enfile sandales et tablier, désinfecte mains, plan de travail et machines. Prêt pour le parfum café crème! Les ristrettos tirés la veille sont mélangés à une base crémeuse, turbinée 15 à 20 minutes, selon la texture que l’ancien restaurateur définit à l’oeil. «Accompagnée» dans le bac, la glace est lissée et déposée en chambre de chocage. Le reste de la masse se répartit dans des pots vendus à l’unité. Mais avant, «il faut goûter!» lance le professionnel en tendant une cuillère.
11:54 | Place à l’arôme fraise. Si ce n’est que la livraison de fruits a été oubliée… «En tant qu’artisan, on doit souvent s’adapter, relate-t-il avec calme. D’ailleurs, j’ai dû prendre des fraises de Carpentras, la culture suisse ayant du retard.»
12:08 | Yannick Tissot, importateur de thés, passe avec un échantillon de matcha bio du Japon. Test en perspective. Mais avant, la turbine accueille la base blanche – qui mature à 2 degrés depuis deux jours –, composée de crème, de lait, de divers sucres et farines… Une future fleur de lait.
12:57 | Les fraises font leur apparition. Mais trop tard pour les préparations prévues ce jour. Christophe Arnoux profite de la présence de quatre mains supplémentaires pour trier les 45 kilos de fruits. De quoi gagner du temps et permettre à l’artisan de concocter l’essai au matcha et sa glace fétiche, aux noisettes et pâte à tartiner du Piémont.
14:18 | Tout est rincé, démonté, en vue de l’arrivée de la femme de ménage. A travers les vitres, le ciel semble dégagé. «On va ouvrir la cabane à Morges», lance-t-il un peu inquiet. La météo de mai n’a pas dopé les ventes. Ce que quatre promeneurs emmitouflés à la Fête de la Tulipe vont confirmer. Autant regagner ses pénates fribourgeoises.
15:30 | En chemin, en ancien assureur fort tchatcheur, il prospecte un marché à la ferme à Vullierens. C’était compter sans la concurrence entre glaciers. Christophe Arnoux n’en tient pas rigueur. Il a une dizaine de points de vente en Suisse romande.
Deuxième jour
9:10 | Rendez-vous à Avenches. Une dégustation est prévue à 15 h 30 afin de faire découvrir les produits (réalisés ici avec du lait de Misery) vendus depuis peu à l’épicerie AventiVrac. «Les gens ne prennent qu’un pot, au vu du prix… Mais lorsqu’ils reviennent, ils en achètent dix!» sourit la vendeuse. Avec Claire-Lise, retraitée toujours disponible pour un coup de main, Christophe Arnoux installe le chariot: sorbets à gauche, glaces à droite. Tout doit être en place pour l’ouverture, où Claire-Lise officiera.
10h03 | Départ pour le Valais, comme tous les 15 jours. «Mon fournisseur de fruits suisses ne livre pas, mais ce trajet me fait du bien!» L’indépendant prend enfin du temps pour lui, non sans répondre à quelques appels, dont celui de cet ami proposant son aide pour équeuter les fraises et effeuiller le basilic. «J’ai un entourage fantastique, même si femme et enfant ont capitulé», rigole-t-il. Petit arrêt à Bovernier pour réapprovisionner le kiosque du bord de route.
13:47 | Fraises et poires mûres à point et non calibrées du domaine Philfruits à Riddes «amèneront un goût parfait» aux glaces prévues cette semaine.
16:24 | La Rosière a approché Oh Gelato pour quelques menus travaux. C’est à la fondation que reviennent ainsi le tri et le lavage des fruits.
18:29 | Retour à Avenches. Un dernier client venu soutenir les produits du voisinage repart satisfait. Christophe Arnoux, lui, a à peine le temps de se préparer trois boules de glace qu’il est temps de ranger le matériel. Demain, il faudra… turbiner.