7.11.2017, Lionel Cretegny / Photo: shutterstock.com
Provenance, substances indésirables: à quelle sauce les fabricants nous servent-ils les conserves? Sur dix produits, trois s’en sortent bien.
Pasta, pizza, bella Italia? Les révélations chocs du printemps dernier concernant les coulis de tomates made in China nécessitaient de se pencher rapidement sur le contenu et l’étiquetage des boîtes de conserve présentes sur le marché suisse. Nous avons donc jeté notre dévolu sur les tomates concassées. Outre l’origine du fruit, nous voulions en savoir plus sur les traitements chimiques qu’il aurait pu subir. Egalement dans le viseur, la résine d’époxy, ce film blanchâtre qui empêche le fer-blanc d’oxyder l’aliment. Pour rappel, notre test de 2012 sur les conserves avait en effet montré qu’une substance problématique, le bisphénol A (BPA), avait migré du contenant au contenu.
Trouver le laboratoire spécialisé capable de vérifier l’origine de la tomate n’a pas été une mince affaire. Et, malheureusement, aucune méthode scientifique n’est à même de la déterminer. Pas d’autre choix donc que de faire confiance aux producteurs, et par les temps qui courent, ce n’est pas peu dire qu’elle est mise à mal! D’autant qu’aucune mention légale précisant la provenance des ingrédients n’est obligatoire.
Nous avons tout de même demandé aux fabricants de nous préciser où leurs tomates étaient cultivées: toutes viennent d’Italie. Si la majorité a même précisé la région, Freshona (Lidl) et Naturaplan (Coop) se sont bornés à nous indiquer le pays. Carloni (Aldi) n’a pas répondu. Nos tomates ne sont visiblement pas chinoises, c’est déjà un bon point.
Déclarer l’origine des produits agricoles est une information capitale. Elle renseigne sur le lieu de production et atteste que le producteur maîtrise son approvisionnement. Cela étant, ne soyons pas dupes. Dans le sud de l’Italie, les conditions de travail des saisonniers sont proches de l’esclavage: un salaire de misère pour des journées harassantes et interminables. Les syndicats estiment à 400 000 le nombre de travailleurs clandestins durant la saison des récoltes. Bien qu’un projet de loi partiellement approuvé soit en train d’émerger, les entreprises ne risquent aucune sanction.
Le laboratoire auquel nous avons confié nos dix échantillons avait pour mission de détecter et quantifier la présence de pesticides et de BPA, une substance reconnue comme perturbateur endocrinien. La FRC s’est chargée de décrypter les étiquettes.
La résine époxy empêche le métal d’altérer la couleur et le goût des denrées. Sauf que du BPA entre dans sa composition (lire ci-contre). Or ce dernier est très préoccupant car il a la fâcheuse tendance à migrer dans les aliments, et en quantité non négligeable. La loi suisse fixe la limite à 600 microgrammes par kilo. Nos échantillons sont loin de ces valeurs, mais le principe de précaution veut que l’on tienne compte de l’«effet cocktail » de toutes les sources possibles auxquelles tout un chacun s’expose. Sur ce point, Migros démontre que s’en passer est parfaitement possible.
Peu d’additifs heureusement
Côté pesticides, la Naturaplan de Coop présente une mauvaise surprise. Si la quantité est faible, elle n’a rien à faire dans un produit bio. La Cirio, Coop encore, et la Freshona de Lidl écopent aussi de pénalités. Les autres s’en sortent la tête haute. Moins grave, mais sanctionnée tout de même, la présence d’acide citrique pour garder une coloration appétissante, car cinq articles montrent qu’il est parfaitement possible de s’en passer. En outre, toutes les conserves se passent de sel ou d’arômes. A saluer.
Le classement du trio de tête se départage sur le prix au kilogramme. Si l’origine de la tomate avait été clairement indiquée, le sans-faute aurait été acquis. Mais un bon résultat dans l’éprouvette ne suffit pas à faire oublier les conditions de travail. Conclusion: dans la mesure où le temps le permet, autant acheter des tomates locales de saison et s’essayer à l’art de la conserve en bocal, garantie sans BPA!
Voir le test des tomates concassées sur test.frc.ch