Multimédia
Testament numérique, rien n'est gravé dans le marbre
Archive · 01 mars 2016

En 2012, l’acteur américain Bruce Willis menaçait Apple d’une action en justice pour que ses filles puissent hériter de sa bibliothèque iTunes. On apprenait plus tard qu’il s’agissait d’un canular, mais cela a eu le mérite d’ouvrir le débat: à l’heure où le numérique prend toujours plus de place dans nos vies, qu’adviendra-t-il, à notre mort, de nos médiathèques virtuelles, de nos comptes e-mail, Facebook, Instagram, Pinterest?
La «propriété» à l’heure digitale
Tout d’abord, il faut s’entendre sur les termes. «Dire «j’ai acheté de la musique sur iTunes» est un abus de langage, explique Nicolas Capt, avocat spécialisé dans les nouvelles technologies. En réalité, vous avez acquis une licence d’utilisation, peut-être illimitée, mais qui n’équivaut pas à un droit de propriété.» Notamment, cette licence n’est pas transmissible à un tiers, comme il est précisé dans les conditions générales. On ne peut donc pas en hériter.
En fait, c’est tout le «patrimoine informationnel» – comptes Facebook, Google, Flickr, Dropbox, etc. – qui échappe au droit des successions. «Nous sommes plutôt dans le cadre des données personnelles, et donc du droit de la personnalité, relève encore Nicolas Capt. Avec comme difficulté que la personnalité juridique prend fin au moment du décès...»
C’est en somme une sorte de no man’s land juridique. Pour l’instant du moins, puisque le conseiller national Jean Christophe Schwaab a déposé en septembre 2015 un postulat estimant qu’il «convient de compléter le droit des successions afin que les données personnelles et les droits d’accès numériques fassent partie de la succession d’un défunt». Un postulat que le Conseil fédéral a proposé d’accepter.
Gérer l’«héritage numérique»
En attendant, qu’est-il possible de faire, aussi bien pour la personne qui veut régler la question de son «héritage numérique» que pour les survivants? Quelques conseils, tirés notamment de Digitales Erbe planen und verwalten, brochure éditée par nos confrères alémaniques du SKS. Primo, faites de l’ordre: quels sont les sites que vous utilisez régulièrement, quels sont ceux que vous n’utilisez jamais et qui peuvent être supprimés? Très pratique, le site justdelete.me fournit les instructions pour trucider votre compte, quand c’est possible, pour pléthore de services en ligne.
Deuzio, utilisez les dispositions prévues par les sites, quand elles existent. Google est un des rares à avoir prévu le cas de figure: son Gestionnaire de compte inactif permet de définir une période d’inactivité, par défaut trois mois, au-delà de laquelle vos personnes de confiance seront alertées et pourront accéder à vos données (Gmail, Drive et toute la nébuleuse des services Google).
Tertio, établissez une liste de vos comptes, avec noms d’utilisateur et mots de passe, à tenir à jour et à stocker en lieu sûr, par exemple sur une clé USB sécurisée. Donnez l’accès à cette clé à une ou des personnes de confiance. Une solution éminemment pragmatique qui a un gros défaut: tenir vos données à jour!
Si cela vous paraît trop fastidieux, vous pouvez aussi passer par les gestionnaires de mots de passe, comme LastPass (voir aussi nos conseils). Plusieurs proposent désormais une fonctionnalité qui consiste à accorder un «accès d’urgence» à certains contacts de confiance.
En revanche, restez à l’écart des diverses sociétés, surtout américaines, qui offrent leurs services pour la digital afterlife. Ce nouveau business, juteux, pose de nombreuses questions de sécurité, de confidentialité, sans parler de la pérennité du service: que se passe-t-il si une entreprise fait faillite?
Et pour les survivants ?
Si rien n’a été prévu, le parcours du combattant commence pour les survivants. D’abord, ils doivent reconstituer la carte numérique du défunt. Après cette première étape, fastidieuse, la seconde consiste à contacter un par un les services concernés. Or tous ont des conditions différentes. Certains, comme Google, Dropbox et Paypal, donnent normalement accès aux héritiers, d’autres sont intraitables.
Prenons le cas des réseaux sociaux. Il est pour le moins désagréable que le profil d’un défunt «hante» internet, envoyant des sollicitations automatiques à ses amis. En général, deux cas de figure sont possibles: soit la suppression du compte, soit sa transformation en compte de commémoration. En revanche, les réseaux sociaux ne donnent jamais aux proches la possibilité de modifier le compte du défunt.
Pour Facebook, il suffit de fournir un lien vers une nécrologie ou «tout autre document attestant du décès», suite à quoi le compte est transformé en memorial. Mais seuls les membres de la famille proche «avérés» peuvent demander la suppression du compte.
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