Téléphoner sans se salir les mains

Un écran maculé de sang et le slogan qui va avec: « Du sang se cache dans nos portables ». C’est l’intitulé de la campagne de Pain pour le prochain et Action de Carême pour une « consommation responsable des produits électroniques ». Les deux ONG publient aujourd’hui leur rating high-tech, évaluant dix fabricants de smartphones et d’ordinateurs.

Apple, Samsung, HTC, Nokia, Sony, HP, Acer, Dell, Lenovo et Asus, soit les entreprises qui détiennent les plus grosses parts de marché en Suisse, sont ainsi sondés sur trois critères : les « minerais de la guerre », le droit du travail et l’environnement.

Autrement dit, s’assurent-elles que les mines où elles s’approvisionnent ne servent pas à financer des guérillas locales en République démocratique du Congo? Sont-elles attentives au respect du droit du travail chez leurs sous-traitants chinois ? Limitent-elles les substances toxiques qui entrent dans la fabrication de leurs appareils ?

Le droit du travail à la traîne

« Nous enregistrons des progrès, notamment sur les questions environnementales, au niveau de l’efficience énergétique et des émissions de CO2, relève Chantal Peyer, Cheffe d’équipe Entreprises et droits humains pour Pain pour le prochain. C’est aussi là que s’exerce le plus de pression du public ». Les montagnes de déchets toxiques, ces décharges à ciel ouvert qui empoisonnent les sols du Ghana ou du Nigeria, ont sans doute marqué les esprits.

De même, cela évolue au chapitre des « minerais de la guerre ». Mais là encore, c’est une pression externe, une réglementation américaine contraignante, qui a fait bouger les choses.

Alors qu’en revanche, les progrès sont très lents en ce qui concerne le droit du travail. « Il ne suffit pas d’effectuer un audit ponctuel, il faut que les ouvriers connaissent leurs droits ; il manque un travail de fond sur la formation et d’information ». Notamment, s’il n’y a pas de liberté syndicale en Chine, il faut encourager la création de commissions de personnel, qui sont autorisées.

Parmi les dix entreprises sous revue, seul HP atteint un niveau satisfaisant sur ce dernier point, comme sur les deux autres, se classant dès lors en tête du rating. Lanterne rouge, HTC pèche sur tous les critères.

Une grande marge de progression

« Certaines marques se ménagent des marges énormes », note Chantal Peyer. Elle prend l’exemple de l’iPhone 4S d’Apple : sur ce produit, la marge de la firme américaine dépasse les 50%. Sur un prix de vente de 560 francs, Apple engrange ainsi un bénéfice de 284 francs. Tandis que son sous-traitant Foxconn doit se contenter d’une marge de 2%. Une situation qui va se répercuter sur ses employés, pressurisés. « Avec une telle marge, Apple et consorts peuvent faire mieux ».

Mais que peut faire, à son niveau, le consommateur ? Consulter le rating high-tech, bien sûr. Même si Chantal Peyer n’est pas dupe : la performance, le look, la nouveauté pèseront plus dans la décision d’achat. Sur un plan politique, le citoyen peut aussi faire pression sur les acheteurs publics, qui ont poids suffisant pour influencer les marques. Enfin, le réflexe de base reste : « Jeter moins vite son téléphone portable. »

• Consulter le détail du rating hightech : www.hightech-rating.ch
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