4.9.2019, Marine Stücklin et Sandra Imsand / image: shutterstock.com
Des programmes utilisés à l’école inquiètent des parents. Ils craignent pour la vie privée de leurs enfants.
Nos informations personnelles sont précieuses. Et suscitent un intérêt croissant de la part des GAFAM. A cet égard, Google et Microsoft en tête proposent des programmes aux écoles, afin de toucher un public toujours plus vaste, plus jeune. Google Suite for Education ou Microsoft Office 365 sont constitués d’une pléiade d’applications par lesquelles, moyennant la création d’un compte nominatif, les élèves peuvent avancer dans leur apprentissage, effectuer leurs devoirs, converser. L’enseignant, lui, peut suivre leur progression, les corriger, leur attribuer des notes ou tenir leur carnet.
Des parents d’élèves bernois, canton où la suite Google a été largement adoptée, nous ont fait part de leur inquiétude. Cette manière de faire soulève en effet beaucoup de questions. Les habitudes de travail d’un écolier, l’effort fourni, ses centres d’intérêt, ses absences, les e-mails qu’il échange, sa localisation, entre autres, sont une mine d’informations pour les géants du web. Des informations potentiellement vendables en masse à l’industrie publicitaire pour s’adapter aux habitudes de consommation de toute une génération ou transmissibles individuellement à un employeur pour montrer la rigueur d’un candidat.
Tant Google que Microsoft assurent ne pas utiliser ce qu’ils collectent pour faire de la publicité ciblée sur les enfants, mais c’est bien la seule garantie qu’ils offrent. Pour le reste, les informations sont utilisées largement et sont partagées avec des tiers. Les personnes concernées peuvent demander à effacer leurs données, mais les conditions auxquelles les plates-formes s’exécutent ainsi que les délais varient. En outre, aucun délai de conservation maximum n’est précisé dans les conditions générales.
Parents hors course
La plupart des cantons romands que nous avons contactés utilisent les services de Google ou de Microsoft ou en étudient la possibilité. Ils ont assuré qu’ils étaient attentifs à la question de la protection des données et qu’ils prenaient des mesures envers les enfants. Toutefois, la question du rôle parental a, le plus souvent, été laissée de côté. Alors que dans l’outil de Google, les parents peuvent en principe gérer les données de leurs enfants, le Département de l’instruction publique de Genève a indiqué que cette possibilité ne leur était pas ouverte.
D’autres points doivent aussi faire l’objet d’une attention accrue de la part des écoles, comme le droit applicable au traitement des données ainsi que le juge compétent en cas de litige. Quiconque devant agir en Californie ou en Angleterre se trouverait en effet bien démuni… De plus, tout compte devrait rester strictement lié à l’activité scolaire et être fermé en fin de 11-Harmos, afin d’éviter que les GAFAM ne détiennent des informations à vie. La création de comptes anonymisés, comme à Genève, et la désactivation de certains paramètres permettraient aussi de renforcer la protection du jeune utilisateur.
Autant de précautions à prendre avant d’accueillir ces nouveautés dans les salles de classe. Si Google ou Microsoft sont prêts à offrir de tels services à bas coût, ce n’est pas par pure philanthropie.