7.3.2023, Yannis Papadaniel
Le régime de remboursement suite à une intervention gagnerait à être amélioré. Il pose de gros problèmes de solvabilité qui mettent en péril les patients mais aussi les entreprises de sauvetage. Explications.
«On peut comprendre que des personnes âgées ou des malades chroniques hésitent avant d’appeler le 144.» Tel était le propos que Georges Vittoz, membre de l’Interassociation de sauvetage (IAS), a tenu à la FRC en 2017 dans un article consacré au régime de remboursement des frais de sauvetage. Les complications y sont multiples: modalités de calculs, montants et participation des patients diffèrent selon le canton de résidence et le type de prise en charge, ainsi que le type d’assurance (celle couvrant les accidents des salariés, LAA, ou celle pour les privés, LAMal).
En effet, l’une des missions des centralistes du 144 est de définir rapidement s’il s’agit d’une situation nécessitant une intervention immédiate, avec ou sans probabilité d’une atteinte des fonctions vitales (respectivement priorité 1 et 2, ou P1 et P2). Si la situation autorise un délai d’intervention voire une prise de rendez-vous, elle est alors classée en P3. La plupart du temps, les interventions en P2 sont considérées comme des transports dont le remboursement par les assureurs est plafonné à 500 fr./an, alors qu’il s’élève à 5000 fr./an lorsque le pronostic vital est engagé. S’il ne s’agit pas d’un accident couvert par l’assurance de l’employeur, les patients paient 50% du montant total de la facture.
L’urgence: une zone grise
La distinction entre sauvetage et transport n’est pas toujours évidente dans le cadre de la LAMal. Étant donné les écarts entre les montants plafonds, elle est pourtant déterminante. Air-Glaciers signale ainsi avoir été mandatée en avril 2022 par l’Organisation cantonale valaisanne des secours pour quelqu’un en détresse respiratoire. Dans ce genre de cas, malgré une baisse de l’état général, on parvient à se rendre par ses propres moyens à l’hôpital. Là, le patient se trouvait dans une cabane alpine à 3000 mètres. Un hélicoptère devait être dépêché.
L’intervention a d’abord été considérée comme un transport par la caisse: sur un total de 6300 fr., seuls 500 fr. auraient donc été remboursés. Le patient, titulaire de la carte de sauvetage Air-Glaciers, a pu bénéficier de l’appui administratif de la compagnie. Celle-ci est intervenue auprès de l’assureur, ce qui a permis de faire reconnaître l’urgence de la situation. Un tel appui est toutefois rare.
Air-Glaciers indique que «la problématique va plus loin pour les patients bloqués en altitude qui ne sont pas blessés. Nous devons les évacuer, toujours sur mandat du 144, car sans intervention ils courent un risque vital. Les assurances LAMal et LAA n’entrent toutefois pas en matière.» La solution pour ne pas se retrouver avec une ardoise, en particulier lorsqu’on se rend régulièrement en haute montagne: opter pour une complémentaire ad hoc ou être titulaire d’une carte de sauvetage.
Part des patients trop importante
Hors montagne, le régime actuel de remboursement gagnerait à être amélioré. Il pose de gros problèmes de solvabilité qui mettent en péril les patients mais aussi les entreprises de sauvetage. Ainsi, un ambulancier neuchâtelois expose le cas d’un patient ayant nécessité quatre interventions en un mois. La première était sans transport, la deuxième sans urgence vitale, contrairement aux troisième et quatrième, effectuées en P1. Le patient se retrouve alors avec une facture de 3325 fr. (voir encadré) dont il doit assumer une grosse partie et dont les modalités de remboursement restent floues. La première intervention sans transport est-elle prise en charge par les caisses? Le régime actuel laisse la place à des réponses à géométrie variable. Le patient n’étant pas en mesure de régler son dû, seule la bonne volonté de l’entreprise lui a évité une mise aux poursuites. Une solution qui soulage le patient, mais qui ne peut pas être appliquée systématiquement.
Pour aller plus loin, lire l’article sur les frais d’ambulance