Commerce

Métrologie: surveiller au gramme près pour acheter juste

Les inspecteurs des services poids et mesures s’assurent que les balances n’escroquent pas les clients. Rencontre.
Alimentation

Archive · 07 juillet 2020

Transportant sa lourde valise métallique, Laurent Pernet s’annonce à l’accueil du magasin Coop Saint-Aubin-Sauges (NE). En ce matin de juin, l’inspecteur des poids et mesures vient contrôler les balances dédiées aux produits préemballés. Habituellement réalisée à l’improviste, la visite du jour a été annoncée, la FRC étant de la partie, bloc-notes et appareil photo en guise de caddie. Mais pas de quoi altérer les résultats. «Nous apposons un autocollant qui scelle nos interventions », souligne le responsable de la section métrologie du Service de la consommation et des affaires vétérinaires (SCAV), tout en désignant la languette intacte. Ceci étant, l’état général de la machine est aussi pris en compte. «On regarde l’instrument dans son ensemble pour contrôler si quelque chose coince quelque part ou si le niveau à bulle fonctionne correctement.» L’instrument doit par ailleurs être homologué. Le signe «CE» et le marquage métrologique en sont notamment la preuve.

Laurent Pernet se rend en magasin comme en usine. «Toute transaction commerciale en lien avec des mesures de poids, de volume et de longueur est du ressort du SCAV!»

Vrac, barquette et sachet

Les poids sont ensuite installés les uns après les autres: de 5007 grammes à 15 kilos, et inversement. Double contrôle afin d’examiner si les erreurs maximales tolérées sont bien respectées. A 5 kilos, l’affichage de 4,998 est ainsi autorisé. Le résultat est probant – le client a même gagné un mini surplus! Pour finir, Laurent Pernet clique sur une denrée au hasard, ici «poulet grillé» affiché à 15 fr./kg. L’étiquette s’imprime: «10 kilos de volaille pour 150 francs», le calcul est bon. Un macaron bicolore «vérifié jusqu’en juin 2021» est alors collé sur la balance, à la vue de tous.

Parallèlement à la vérification des instruments, les inspecteurs du SCAV s’occupent de la surveillance du marché en ce qui concerne les déclarations métrologiques sur les préemballages. Si la balance fait correctement son travail, qui nous dit que le carpaccio emballé vaut réellement le poids indiqué? Laurent Pernet en fait une démonstration: à la pesée, l’entier du produit est plus lourd de 30 grammes. Barquette et couvercle ont donc été tarés. De quoi rassurer. A noter encore que, légalement, une certaine perte de poids (perte d’humidité) reste admissible, l’information ayant été inscrite à l’instant précis du préemballage.

L’exemple d’un brocoli sous cellophane démontre aussi qu’une tare de 4 grammes est appliquée d’office lorsque le numéro du légume choisi est inséré sur la balance. «Il y a une dizaine d’années, on a dû se battre pour les tares, notamment les sacs en papier de 7 grammes, raconte le responsable. Il a fallu que cela rentre dans les moeurs.» Aujourd’hui, seuls les sacs en plastique de 2 grammes sont encore autorisés. D’ici à 2025, l’exception ne sera plus applicable; ils devront être déduits automatiquement.

La balance doit bien indiquer zéro. Si des étiquettes sont collées dessus, enlevez-les car elles peuvent fausser le résultat. Le poids net s’obtient en pesant les achats sans sac en tissu.

Spécificité helvétique

Dans le cadre de ses fonctions, la section métrologie se penche annuellement sur les contrôles statistiques auprès des industriels. Une semaine plus tôt, Laurent Pernet s’est ainsi rendu en pleine nuit à la boulangerie Jowa à Marin afin d’y inspecter différents pains. «Le poids varie en fonction de l’humidité. Du coup, nous devons réaliser nos contrôles au plus tard huit heures après que la production est terminée, explique-t-il. Le contrôle se fait en prélevant un échantillon pouvant varier entre 30 et 80 pièces en fonction du total produit en une heure. La Suisse a une spécificité par rapport à l’Europe; en dessous de 100 pièces, on les pèse toutes.» Produits de boulangerie, mais aussi vins, frites, glaces, cosmétiques, crèmes, bouteilles de gaz, chaque entité cantonale se doit de vérifier les productions établies sur ses terres. Un article étranger possédant la marque de conformité «e» aura, quant à lui, dû être soumis à inspection dans son pays d’origine. Sans ce sigle, la vérification de la quantité revient à l’importateur.

Laurent Pernet a terminé sa tournée du jour. Le suivant, il s’occupera d’une pharmacie, d’une raffinerie, d’un camion citerne ou d’une station-service... Car «dès qu’une transaction commerciale a lieu en lien avec des mesures de poids, de volume et de longueur, c’est de notre ressort».

Contrôle

Un rythme trop lent?

Vérifier l’exactitude des instruments de mesure de préemballage – sandwichs, tartares, salades, etc. – cela se fait annuellement. Idem sur les marchés; les balances étant déplaçables, elles risquent plus d’indiquer des valeurs faussées. Les mécaniques, plus vieilles mais plus fiables, sont examinées tous les quatre ans. Pour les boucheries, fromageries, épiceries en vrac, magasins de ferme, etc., ainsi que les balances de grandes surfaces présentes dans les rayons et aux caisses, le délai appliqué est de deux ans. Un laps de temps qui peut sembler long entre deux contrôles.

Questionné, Coop assure ainsi faire régulièrement ses propres examens des balances avec un calibreur. Le personnel de vente, lui, s’en occupe quotidiennement et les remet à zéro si nécessaire. Concernant Migros, la société qui fournit les balances du canton de Vaud procède à une révision complète et à un contrôle bisannuel. Les acheteurs de balances à l’interne de Migros Genève effectuent aussi les vérifications nécessaires. Quant aux succursales de Neuchâtel-Fribourg, aucun contrôle supplémentaire n’est effectué. Selon Jürg Niederhauser, chef de l’état-major chargé de l’information à l’Institut fédéral de métrologie, «les délais sont déterminés de telle manière qu’ils suffisent à maintenir les caractéristiques métrologiques d’un type d’instruments dans les limites des erreurs tolérées pendant le délai de vérification».

A ce titre, en 2019, sur les 7750 lots de préemballage de même quantité nominale qui ont été contrôlés en Suisse et dans la principauté de Liechtenstein, 441 ont été contestés (5,7%). Pour les préemballages de quantité nominale variable, 5875 préemballages ont été mesurés, et 443 étaient non conformes (7,5%).

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