26.3.2013, Sophie Pieren / Photo: Sébastien Féval
Un œuf suisse sur cinq est bio. Le label garantit des conditions d’élevage optimales. Mais à quoi ressemble la vie d’une poule pondeuse? Reportage.
L’œuf de Pâques dévale la colline qui surplombe le village. Au milieu de sa course, il heurte une pierre et vole en éclats. Riant de bon cœur, une fillette se précipite et ramasse les morceaux de coquille multicolores…
Cet œuf, c’est Lucette qui l’a pondu. Depuis huit mois, cette poule vit dans l’exploitation bio de Jean-Marc Pittet à Villarlod (FR). Elle y partage, avec 2000 congénères, un espace de 600 m2 (soit deux fois moins dense que dans un élevage traditionnel). Toutes sont là pour la même mission: produire des œufs qui seront vendus dans les supermarchés.
Lucette a de la chance: ses éleveurs sont tenus de la traiter avec soin s’ils veulent que ses œufs soient certifiés bio. Depuis sa naissance, elle bénéficie de ce qui se fait de mieux en Suisse pour une poule. Notamment en termes de nourriture: elle ne mange que des céréales bio, principalement du maïs et du soja non OGM, savamment enrichies en acides aminés et en calcium. C’est chez un éleveur lucernois spécialisé dans la production de poussins bio que Lucette a vu le jour, au printemps 2012. Au lendemain de l’éclosion de son œuf, elle a quitté ce couvoir pour une poussinière bio dans le canton de Soleure. Elle y a passé son enfance, avant de rejoindre Villarlod.
Epanouissement garanti
Mais, ce matin, Lucette a d’autres préoccupations que de songer au passé. Perchée au sommet de sa volière, elle se sent d’humeur joyeuse. Dès que les portes du jardin d’hiver s’ouvriront, vers 7 h, elle ira faire un petit tour à l’air libre. Ce qui la réjouit le plus, c’est le bain de sable… elle adore s’y rouler pour lisser son plumage. A cause de la neige, elle ne pourra pas se balader dans le pré d’un hectare. Mais la volière et le jardin d’hiver lui suffisent pour s’ébattre. Et tout a été pensé pour répondre à ses besoins: elle peut grimper sur des perchoirs, gratter le sol, partir en quête de grains cachés sous la paille. Même faire la cour à l’un des coqs, juste pour le plaisir…
«Nous tenons à ce que nos poules soient épanouies. C’est important pour leur bien-être, mais aussi pour leur productivité», explique Jean-Marc Pittet. Lucette est tout de même là pour pondre! Comme ses camarades, elle est arrivée dans l’exploitation à 18 semaines, âge de sa maturité sexuelle. Elle a eu à peine une semaine pour s’habituer aux lieux avant que son cycle de ponte ne démarre. Depuis, elle produit un œuf par jour. Lorsque l’aube pointe, elle part en quête d’un endroit sûr et sombre. Les nids, placés en hauteur et à l’abri de la lumière, offrent une cachette parfaite, qu’elle a adoptée.
La seule différence avec la nature, c’est qu’elle n’a pas le temps de couver: son œuf tombe sur un tapis roulant, qui l’emporte immédiatement. Dans la matinée, Jean-Marc Pittet récupère les quelque 1800 œufs un à un… les contrôle, les nettoie, les passe dans l’imprimante qui leur appose une date et un code, puis les dépose dans un local tempéré. Ils sont ensuite récupérés par un grossiste, qui les livre dans les supermarchés.
La vie de Lucette prendra fin cet été. Après une année, sa productivité commence à baisser. Jean-Marc Pittet profitera donc du calme des vacances pour se séparer des poulettes et nettoyer les halles. Avec un peu de chance, Lucette ira finir ses jours en toute quiétude chez un privé. Sinon, l’association GalloCircle se chargera de son abattage et de la transformer en viande.
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