12.7.2010
Résiliation surprise de votre contrat par votre assureur? Forte augmentation de votre prime en cours de contrat? Ne vous étonnez pas, la loi sur le contrat d'assurance (LCA) n'a pas la réputation de protéger les assurés. Il faut vous attendre à tout!
Les assurances privées telles que les assurances vie, ménage, casco, RC, protection juridique et maladie complémentaire (à ne pas confondre avec l’assurance maladie de base, soumise à la LAMal) sont régies par la LCA (loi sur le contrat d’assurance). Cette loi laisse énormément de liberté aux assureurs dans la rédaction de leurs conditions générales (CGA), même si ces dernières et les tarifs sont théoriquement soumis à un contrôle de l’autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA).
Les deux exemples suivants ne font que rappeler qu’il y a une partie forte et une partie faible lors de la conclusion d’un contrat d’assurance, et que vous n’êtes donc jamais à l’abri d’une très désagréable surprise en cours de contrat. C’est ce qu’ont vécu deux de nos membres qui se sont récemment adressés à notre Permance.
1er témoignage: Il paie pour la grêle
Daniel Bachmann, d’Evilard, n’en revient toujours pas. Il a reçu, il y a quelque temps, un courrier de son assureur véhicule à moteur TCS-Bâloise l’informant sans ménagement que son contrat d’assurance conclu début 2005 sera prochainement résilié. Passé le moment de stupéfaction, M. Bachmann s’enquiert des raisons de cette décision, en précisant que « en quarante deux ans de conduite, je n’ai causé qu’un seul accident, mais aucun sous contrat avec le TCS. J’ai malheureusement été grêlé deux fois, mais qu’y puis-je?«
Au fait, pourquoi l’agence du TCS ne voulait-elle plus assurer son fidèle membre depuis bientôt quarante ans? Daniel Bachmann n’a jamais eu de réponse, malgré quatre téléphones et trois courriers. « Je suis scandalisé par cette façon de procéder consistant à ne pas trouver d’explication (alors qu’elle est certainement bien connue), à renvoyer la balle d’un département à l’autre, à ne pas répondre à une succession de courriers, et cela jusqu’à la direction », s’insurge-t-il. Une secrétaire a toutefois fini par lâcher que « vraisemblablement il coûte trop cher à l’assurance! ». C’est effectivement l’argument que nous fournit le TCS, via son porte-parole: « Les raisons de la résiliation sont liées au taux de sinistralité de cette police d’assurance. En effet, les dommages remboursés durant cette période étaient largement supérieurs aux primes encaissées. »
Sachant que l’assurance responsabilité civile automobile est obligatoire pour rouler, il ne reste plus qu’à trouver rapidement un autre assureur qui veuille bien de M. Bachmann, à défaut de quoi il pourra ranger définitivement son véhicule au garage. Et notre membre de conclure: « Je trouve assez cocasse de recevoir une offre de cette même assurance pour ma deuxième voiture assurée dans une autre compagnie au moment même où mon contrat a été résilié. »
L’assureur peut fuir après un sinistre
La loi sur le contrat d’assurance (LCA) actuellement en cours de révision prévoit effectivement la possibilité pour l’assureur de résilier un contrat d’assurance lors d’un sinistre partiel ou pour la prochaine échéance, et cela pour toutes les branches d’assurances privées (ménage, maladie complémentaire, RC, casco, etc.). Cette épée de Damoclès pour les assurés est maintenue dans le nouveau projet de loi, ce qui a soulevé une vague de contestations de la part des associations de consommateurs, notamment en ce qui concerne les assurances maladie complémentaires.
Si le législateur entend maintenir cette possibilité d’expulser les « mauvais » risques, choisissez de préférence les assureurs qui y renoncent dans leurs conditions générales.
2ème témoignage: Elle subit une augmentation surprise
Anne-Lise Clerc, assurée en complémentaire chez Assura, a vu d’un mois à l’autre sa prime augmenter de 30%. Un assureur peut-il réellement décider d’une telle hausse à tout moment, en changeant unilatéralement les règles du jeu? Oui, le Tribunal fédéral ayant admis en octobre 2008 le caractère licite d’une telle clause dans les CGA, pour autant qu’elle permette une résiliation par l’assuré.
Antoine, à qui la même mésaventure est arrivée (+30% pour lui et +45% pour sa femme), s’insurge: « Même si ceux qui peuvent se payer des assurances maladie complémentaires en ont théoriquement les moyens, j’ai le sentiment qu’il s’agit d’un marché de plus en plus fermé, où l’assuré est complètement captif. L’alternative du changement d’assureur est illusoire, car le nouveau se basera sur les mêmes constats et réserves. Est-ce le but du système d’avoir une médecine à deux vitesses? Ce débatne concerne pas que les « riches », mais une large frange de la classe moyenne, qui l’est de moins en moins… à force d’être ponctionnée de tous les côtés. »
L’assureur peut modifier le contrat tout seul
Les CGA permettent très souvent à l’assureur d’augmenter unilatéralement la prime de mois en mois, avec la possibilité donnée à l’assuré de résilier le contrat suite à cette hausse. La LCA étant muette sur ce point (cela pourrait changer avec l’actuelle révision), la FINMA précise dans une circulaire, entrée en vigueur en mai 2010, que des adaptations des primes extraordinaires peuvent ou doivent être effectuées en cours de contrat si des risques non prévisibles importants se sont manifestés. Les primes ne doivent en effet être ni abusivement élevées ni tellement basses qu’elles compromettent la solvabilité de l’assureur.
N’en demeure pas moins que la situation dénoncée par Antoine et Anne-Lise peut s’avérer problématique pour des assurés âgés ou en mauvaise santé, qui, faute de moyens financiers, n’auront pas d’autre choix que de renoncer à leur assurance complémentaire. En effet, pour les personnes cataloguées comme « mauvais risque », il est quasi impossible d’être acceptées par un nouvel assureur. Contrairement à l’assurance de base, les assureurs privés recourent au questionnaire de santé pour sélectionner les bons risques et laisser sur le carreau ceux qui auraient le plus besoin d’une telle couverture!
Contrairement au courtier ou au conseiller, qui verra sa commission augmenter si le contrat est conclu pour une longue durée, l’assuré n’en tirera aucun intérêt. Soyez donc attentif au moment de conclure ou de renouveler un contrat, et imposez la durée que vous désirez, car très souvent le courtier y aura glissé discrètement une durée de cinq ou dix ans (le projet de révision prévoit, quant à lui, une durée minimale et maximale de trois ans)!