4.12.2012, Nicolas Berlie et Valérie Muster
Dès 2013, la garantie de base passe d’une à deux années en Suisse. Mais qu’est-ce que cela change pour le consommateur ? Et quel en est impact pour les vendeurs ? Récapitulatif.
La Suisse se met au diapason de l’Europe un peu tardivement: dès le 1er janvier 2013, la garantie de la «chose vendue» passe d’une année à deux ans, comme c’est déjà le cas chez nos voisins. Telle est la teneur de la dernière révision du Code des obligations (CO), censée apporter davantage de protection pour l’acheteur: il arrive souvent que ses droits «se prescrivent avant qu’il ait découvert un éventuel défaut de la marchandise, écrivait l’Office fédéral de la justice dans un communiqué. L’allongement du délai à deux ans permet d’atténuer le problème.»
Toutefois, dans les faits, de nombreux distributeurs ont déjà anticipé la loi. Chez Manor, chez Coop ou chez Migros, une grande partie de l’assortiment est d’ores et déjà garanti deux ans. C’est le cas aussi à la Fnac, qui prévoit même trois ans de garantie sur les téléviseurs. «Le coût reste supportable pour nous, et cela constitue surtout un avantage important pour les clients», explique Florian Trequesser, responsable des services pour Fnac Suisse.
Moralité: pour la Fnac comme pour les géants de la distribution, la nouvelle loi ne va pas entraîner de grands changements. Avec un petit bémol pour l’informatique et la téléphonie, où les douze mois de garantie sont encore la norme.
Par ailleurs, les marchands vont continuer à proposer des prolongations de garantie et des assurances. Un business «intéressant», reconnaît Florian Trequesser. Intéressant pour le vendeur comme pour le client? «Avec une prolongation de trois ans supplémentaires sur un téléviseur, vous couvrez toute la durée de vie du produit. De plus, à la Fnac, la reprise à domicile ainsi que la redépose du produit sont incluses. Les écrans devenant de plus en plus grands, donc encombrants, ce n’est pas négligeable.»
Apple condamné en Italie
Mais tous les marchands n’accueillent pas le 1er janvier aussi sereinement. Car certains, comme Media Markt et Füst, n’offrent encore qu’une garantie de douze mois. Ils doivent donc adapter leurs conditions, et ce n’est pas sans douleur. «Le problème, c’est que de nombreux fabricants refusent, à titre transitoire, de pourvoir leurs produits d’une garantie de deux ans», relève Séverine de Rougemont, porte-parole de Media Markt. Et vu qu’il incombe au distributeur, et non au constructeur, d’assurer la réparation ou le remplacement durant la période de garantie, «les commerçants doivent assumer la plupart des frais supplémentaires dans une branche où les marges sont déjà réduites.»
Selon le nouveau texte de loi, le vendeur ne peut pas raccourcir le délai de garantie pour les marchandises neuves lorsque le contrat est passé avec un consommateur privé. Il faudra donc être vigilant et rester intraitable. Rappelons qu’Apple a été condamné en Italie, en 2011, pour ne pas avoir respecté, en violation du droit européen, les vingt-quatre mois de garantie. Et surtout pour avoir vendu des prolongations de garantie de deux ans, faisant payer pour une année qui aurait dû être gratuite…
Ce qui change pour l’acheteur
Seule la prolongation du délai est modifiée en 2013. Les droits et les obligations de l’acheteur restent identiques. A savoir:
Vos droits
Si l’objet que vous venez d’acquérir présente un défaut, vous pouvez demander la résiliation du contrat, la baisse du prix ou le remplacement de l’objet. La réparation ne fait pas partie de cette liste, mais peut être prévue par le contrat de vente, en plus des droits précités ou en remplacement.
Vos obligations
L’acheteur est tenu de vérifier immédiatement l’état de la chose et d’aviser sans délai le vendeur en cas de défaut. Il est recommandé d’envoyer un courrier d’avis des défauts dans les deux jours après la réception de l’objet. Si un défaut apparaît par la suite, il faut faire valoir ses droits dans le délai légal de deux ans dès le 1er janvier 2013 (cinq ans pour les ouvrages immobiliers ou les objets intégrés, tels la moquette ou le four encastrable, dans de tels ouvrages). Le contrat peut prévoir d’autres obligations, par exemple celle de retourner l’article dans son emballage d’origine – autant que possible, pensez à conserver les cartons! De même, le remboursement peut se faire par un bon d’achat et non pas en espèces…
Il vous incombe aussi d’apporter la preuve de la date et du lieu d’achat de l’objet. Gardez donc impérativement vos tickets de caisse et faites-en même des photocopies, car l’encre a une fâcheuse tendance à s’effacer avec le temps. Enfin, avant d’apporter un objet défectueux en réparation, pensez à en prendre une photo: les services après-vente sont parfois peu soigneux, vous pourrez ainsi prouver que l’objet a été remis entre leurs mains en bon état.
Conseil
En présence d’un défaut, il faut d’abord vérifier ce que prévoient le contrat, les conditions contractuelles et le ticket de caisse. Si rien n’est précisé, ce sont les articles 197 et suivants du Code des obligations qui font foi.
Ce qui change pour le vendeur
Les obligations du vendeur sont étendues en 2013, pas ses droits. A savoir:
Le vendeur professionnel
Désormais, il a l’interdiction de réduire la durée de garantie lorsque l’acheteur est un consommateur privé. Par exemple, il n’est plus possible, dans le cas des téléphones portables, de limiter la garantie à trois mois sur la batterie (art. 210 al. 3 CO). Seule exception, les objets d’occasion, où une durée minimale d’un an est admise. Toutefois, un vendeur peut toujours exclure la garantie du contrat de vente, notamment en cas d’exposition à l’humidité ou lors de chocs. Seule la réduction devient impossible! Il faut dès lors être vigilant et bien lire les petites lettres du contrat, en quête d’éventuelles exclusions.
En cas de réparation
On change de cadre légal, passant d’un contrat de vente à un contrat d’entreprise. Les règles relatives à la prescription des droits de l’acheteur s’appliquent par analogie. Cela signifie que démarre une nouvelle période de garantie de deux ans, mais uniquement sur la pièce réparée – par exemple, le laser d’un lecteur Blu-ray ou une charnière de meuble. En effet, le nouveau délai de deux ans s’applique aussi aux défauts résultant d’un contrat d’entreprise (travaux de peinture, maçonnerie, réparations de garagiste). Dans le cas d’ouvrages immobiliers ou d’objets incorporés dans de tels ouvrages, le nouveau délai est de cinq ans.