Habitat
Décoration d’intérieur: jeter un meuble n’est plus une option
Archive · 28 janvier 2020

Céline Richard n’est pas une brocanteuse comme les autres. Au fond de sa boutique, la voilà affairée à détourner un objet. Aux «Astuces d’AgathE», meubles et accessoires ne sont pas que chinés; certains sont remis au goût du jour par cette passionnée de décoration. Aujourd’hui, c’est à une table qu’elle s’attelle. Celle-ci a été récupérée chez une dame partant en home, mais aurait pu provenir d’un client dont l’objet lui tenait à coeur. Ou de la brocante, de la déchetterie, de la rue même. «Bien des gens se disent que c’est trop vieux ou trop foncé. Et ne voient pas le potentiel.»
Et pourtant! Après une bonne demi-heure à poncer à la main ainsi qu’avec une ponceuse électrique – «Le gros du job!» –, le résultat confirme ses dires: le beau bois du plateau apparaît. «Il arrive que ce soit vraiment laid, rigole la Chaux-de-Fonnière. Mais du moment que l’on a de l’imagination, on peut tout refaire.» Restauration mise à part, loin de la portée de cette autodidacte qui collabore avec des menuisiers et des tapissiers.
La table du jour ne nécessitera que quelques étapes (lire encadré ci-dessous). Flambant neuve, elle fera le bonheur d’une cliente moyennant 200 francs. «En comptant 2 heures et 45 minutes de travail, le relooking – hors matériel – reviendrait à 140 francs. Je pense qu’il est difficile de trouver un meuble en bois massif à ce prix-là… D’où l’intérêt de ne plus jeter! D’autant que tout se modifie et peut être changé selon ses envies, année après année.» Un véritable choix écologique!
Réelle demande
A Riaz, en Gruyère, la philosophie va plus loin. Catherine Monème-Derungs propose des cours de patine dans son atelier «Dans l’Air du Temps». «Je les ai lancés en 2013 en même temps que la boutique; il y a une réelle demande.» En ce jeudi de janvier, trois participantes sont au rendez-vous, nombre maximum. Pour Violaine, c’est une première... et ce pour une question de couleurs. «J’adore le rose-mauve, et en magasin, il n’y a pas toujours ce que je cherche. Donc me voilà!» Le guéridon – décapé et poncé par un professionnel au préalable – commence à s’embellir de rose et mauve, avec une peinture naturelle. «Savoir quels sont les produits les moins nocifs rend service, note la novice. Et surtout, c’est un cours qui incite à être écolo. Je regrette de ne pas avoir gardé les meubles de ma maman… Désormais, j’y penserai avant de jeter!»
Geneviève a, elle, pris ce réflexe il y a cinq ans, lorsque son père est parti en maison de retraite. Les photos de ses réalisations défilent sur son téléphone portable. «C’est sans fin, et plein d’originalité. On ne s’en lasse pas, sourit-elle. Je viens régulièrement, car avec mon petit appartement et mon chat à poils longs, c’est compliqué…» Deux tiroirs de la commode ont déjà été revêtus de noir et là, remplie d’excitation, elle s’attaque au troisième avec un pochoir au motif floral: «Ça va être beau!» «Et surtout, c’est une pièce unique», se réjouit Catherine.
A côté, Véronique remplit les interstices et défauts de sa chaise afin que le rendu soit le plus lisse possible. A 10 heures, la chaleureuse pause café prend des airs de passage obligé pour laisser aux produits le temps de sécher. «Normalement, c’est à l’air libre, mais pour aller vite, on continuera au sèche-cheveux», explique la professeure. Toutes trois reprennent le travail: ça foehne, ça égrène (poncer gentiment), ça aspire les poussières, ça s’extasie en coeur sur les avancées des unes et des autres. Violaine attaque une deuxième couche «bien plus facile», Véronique applique la peinture choisie en lien avec le tissu de la chaise, Geneviève noircit les poignées de la commode, puis passe au relooking d’un fauteuil. Meuble qu’elle retapera dans sa totalité, en suivant un cours de restauration de siège proposé par Véronique, elle-même tapissière- décoratrice à Charmey. Tout comme pour la peinture «c’est un coup de main à prendre: au début, on est gauche, mais au bout d’une heure et demie, ça vient!», s’exclame-t-elle.
Savoir-faire partagé
A la pause de midi s’ensuivent les astuces de Catherine ainsi que les réflexions artistiques. Ajoute-t-on une deuxième couche ou plutôt une cire? Veut-on faire ressortir le noeud du bois? Va-t-on user ou non dans les reliefs? De minuscules hésitations se devinent à l’approche des pinceaux, du papier de verre et de la laine d’acier. «Je suis dans une extrême tension! » plaisante Geneviève, perfectionniste. Heureusement, quoi que fassent les élèves, rien n’est irrattrapable.
La fin du cours approchant, aucun meuble n’aura été totalement finalisé, un laps de 24 heures étant impératif entre les deux couches d’huile ou de cire, qui d’une part fixeront la peinture, d’autre part imperméabiliseront et nourriront le bois. Une énième attente, certes, qui sera bien vite oubliée face à la satisfaction de voir sa propre création relookée à la maison!
Etapes: transformation pas à pas
De l’alcool à brûler pour enlever les traces de graisse, et c’est parti pour «le côté sympa du relooking», la peinture. Céline Richard détaille: «Quand je prends un meuble, je sais à peu près ce que je veux faire. Là, je pensais peindre les côtés, mais le bois est si joli que je vais les laisser bruts et ne m’occuper que des pieds.» Avant, une sous-couche blanche est appliquée. Elle séchera 24 heures. Retour à l’atelier le lendemain pour assister à la première couche couleur taupe. Puis nouveau temps de séchage de 24 heures. Une seconde couche sera ajoutée en haut des pieds, accompagnée du même temps d’attente. Nous nous retrouvons une ultime fois pour la touche finale, la céruse, qui consiste à poncer la peinture avec du papier et de la fibre de verre afin de donner un effet vieilli et mat aux pieds de la table. «Je trouve cela plus joli sur un objet qui possède des moulures », souligne celle qui avoue apprendre tous les jours de son métier. Deux poignées sélectionnées avec soin, une huile sur le plateau, et le tour est joué.
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