9.5.2012, Aline Clerc et Huma Khamis, en collaboration avec l’ACSI / Photo: Sébastien Féval
Les aliments réfrigérés dont la date de consommation est dépassée ne sont pas tous bons pour la poubelle. C’est ce que démontre un test effectué par nos confrères tessinois de l’ACSI. Test et conseils pour éviter de jeter inutilement. Car le gaspillage alimentaire n’est pas une fatalité.
En Suisse, une poubelle domestique engloutirait annuellement entre 50 et 100 kilos de déchets alimentaires par habitant! Ainsi, outre les producteurs et les distributeurs, les consommateurs participent activement au gaspillage alimentaire, véritable fléau des pays industrialisés. Dans la majorité des cas, ces détritus ont pour origine des achats non programmés, les produits étant accumulés dans nos caddies par envie ou par compulsion. Conséquence: la nourriture prolifère aussi dans nos frigos et, faute d’être consommée dans les délais fixés sur l’emballage, est jetée par précaution.
Or, on s’en doute, un aliment ne cesse pas d’être comestible au douzième coup de minuit du jour de la date limite affichée sur l’étiquette. Alors jusqu’à quand reste-t-il bon? A cette question simple, la réponse peut se révéler surprenante, même si elle se doit d’être nuancée en fonction du type de nourriture. Certaines denrées réfrigérées se conservent en effet jusqu’à quatre semaines après leur date limite, comme le démontre un test réalisé avec nos confrères tessinois de l’ACSI. Conservés dans un frigo familial, des produits ont été analysés et dégustés après l’échéance fatidique, histoire de vérifier si tous les aliments qui finissent à la poubelle sont forcément impropres à la consommation.
Douze aliments au banc d’essai
Pour ce test bactériologique et gustatif, douze denrées réfrigérées – lait pasteurisé, yogourts, jambon, tiramisu, etc. – ont été achetées en supermarché, chacune en plusieurs exemplaires, avec une date limite de consommation identique. Dans un premier temps, elles ont été conservées au frigo, dans leur emballage d’origine intact, par deux familles. Rien n’a été laissé au hasard, puisque la température a été constamment contrôlée, affichant en moyenne de 6 °C à 8 °C, soit au-dessus des 5 °C habituellement recommandés. De quoi reproduire les conditions normales dans lesquelles sont stockés les aliments à la maison.
Puis, au lieu de jeter ces produits arrivés à la date limite, nous avons, d’une part, fait analyser les aliments qui présentent un risque microbiologique, d’autre part, procédé à une dégustation par un courageux jury sélectionné par l’association tessinoise de défense des consommateurs. Les produits laitiers (lait, fromage, yogourts) n’ont pas été analysés, mais seulement dégustés. En effet, lors de leur fabrication, la loi exige un contrôle qui vérifie l’absence de bactéries pathogènes dans le lait. Les produits finis contiennent des bactéries naturellement présentes dans le lait (flore) ainsi que des ferments ajoutés pour leur fabrication (fromages, yogourt). Il n’existe pas de limites légales pour ces micro-organismes indispensables.
Les yogourts, champions de la survie
Grands vainqueurs de l’épreuve de survie en frigo: les yogourts. En effet, près d’un mois après leur date limite, les yogourts aux fraises et aux framboises ne présentaient aucun défaut à la dégustation et ont pu être mangés sans problème. La variante aux baies des bois a résisté honorablement, mais présentait un défaut gustatif dès le milieu de la troisième semaine après sa date de péremption. Autre produit laitier qui ne souffre pas du temps qui passe: le cottage cheese, parfaitement consommable quatre semaines au-delà de la date limite.
De leur côté, le jambon cuit de campagne de la marque Bell, le fromage d’Italie M-Classic et la crème brûlée Bonne Maman de la marque Andros se portent également à merveille au terme de l’épreuve de quatre semaines.
Ces très bons résultats sont à pondérer par quelques produits qui n’ont pas tenu tout un mois. Le tiramisu, par exemple, présentait des moisissures au milieu de la troisième semaine, incitant nos vaillants goûteurs à y renoncer. La terrine au poivre a pris un étrange goût de savon deux semaines et demie après sa date de péremption, dû certainement à l’hydrolyse des matières grasses.
Pour ce qui est du jambon de dinde acheté chez Manor, les résultats d’analyses microbiologiques à la date limite n’étaient pas conformes à la loi. L’ACSI a dès lors interpellé le fabricant, même si ce produit dépassant les valeurs limites pour les germes n’en devenait pas pour autant dangereux pour la santé. Enfin, plus fragiles, les laits pasteurisés bio et non bio voient leur goût changer quelques jours seulement après la date limite. Le lait «caille» en raison des bactéries naturellement présentes.
Ce test le prouve: dans bien des cas, les aliments réfrigérés peuvent être consommés plusieurs semaines après qu’ils soient considérés comme périmés. Certes, effectuée sur un échantillon réduit, cette étude ne permet pas d’extrapoler à tous les aliments frais vendus en supermarché. Mais il est intéressant de constater que, malgré le fait que la loi interdise la vente de produits dont la date est échue, cela ne signifie pas pour autant que tous soient dangereux ou qu’il faille nécessairement les jeter. Le gaspillage n’est pas une fatalité. Et, pour s’en prémunir, il convient de se fier parfois à son nez, l’un des plus anciens indicateurs en la matière!
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