28.4.2020, Aude Haenni / L’accès à l’information n’est pas simple. Recourir à une conseillère en planning familial permet d’aborder la réflexion en profondeur. Photo: Jean-Luc Barmaverain
Pilule, symptothermie, dispositif intra-utérin, les moyens ne manquent pas. Reste à trouver le plus adéquat. Le (petit) tour de la question de la FRC.
Symbole de la libération féminine qu’elle a incarnée depuis les années 1960, la pilule a vu sa réputation sérieusement s’entacher suite aux différents scandales des 3e et 4e générations. Depuis, les chiffres annoncés ici et là semblent démontrer que les femmes sont de plus en plus enclines à abandonner la contraception hormonale. «Les statistiques suisses sont rares, mais il y a effectivement davantage de discours dans ce sens, de discussions ordinaires entre femmes sur le sujet et surtout d’espaces pour en parler», relève Alexandra Afsary, doctorante à l’Unil, qui s’intéresse depuis 2013 aux expériences contraceptives d’un point de vue sociologique et anthropologique.
Rencontrant de nombreux couples pour évoquer leur parcours de vie à ce sujet, la chercheuse a constaté que ceux qui souhaitaient d’autres options se référaient principalement à trois raisons: «L’impact négatif sur la santé vient en premier, mais ce ne sont pas les problèmes graves qui sont nommés; plutôt les migraines, les idées noires, la perte de libido… Une majorité de femmes relient les hormones de synthèse à ces symptômes. D’autres découvrent une énorme poussée d’acné en arrêtant leur contraception hormonale, et réalisent son action sur leur corps. Enfin, il y a cette remise en question, en tant que femme, d’assumer la responsabilité contraceptive.»
Aussi, certains couples se retrouvent désormais plus aisément dans d’autres méthodes. A l’image du préservatif, du stérilet au cuivre, de la symptothermie, et même du «bricolage» (observation durant l’ovulation et préservatif). Ils font leur choix selon leur situation de vie, ou selon une notion de sécurité.
Le meilleur choix est un choix libre
Qu’elle soit hormonale ou non, au cuivre, naturelle et même permanente, «le choix de la méthode est au final très personnel», fait remarquer Angela Walder-Lamas, conseillère en santé sexuelle et sage-femme à l’Unité de santé sexuelle et planning familial des HUG à Genève. Et comme le dit si bien le médecin Martin Winckler dans son ouvrage de référence Contraceptions mode d’emploi: il faut tenir compte du fait que, tout comme la sexualité, la contraception change avec la vie. Il souligne aussi que «la meilleure contraception est celle que la femme (ou le couple) choisit librement, en connaissance de cause».
Si ce n’est que «l’accès à l’information n’est pas si simple, relate Alexandra Afsary. Les gynécologues orientent leurs patientes vers ce qu’ils connaissent, alors même que les femmes n’ont pas toutes les mêmes envies. De ce que j’ai pu observer, il ne faut pas hésiter à se renseigner auprès d’une conseillère en santé sexuelle de planning familial, qui va aborder le sujet en profondeur, car son métier lui permet de prendre le temps.»
Le pharmacien dispose également d’une vue d’ensemble. Son rôle est aussi de conseiller.
Quel dispositif pour qui ?
A l’Unité de santé sexuelle et planning familial des HUG justement, c’est encore la pilule qui est choisie en deuxième intention – après le préservatif – par les jeunes de 16 ans. «Elles ne désirent souvent qu’une chose: éviter une grossesse», explique la conseillère. Moins dosée qu’à ses débuts, la pilule représente une contraception «simple» pour qui ne présente pas de facteurs de risque. «Des femmes ayant arrêté à cause de la controverse l’ont finalement reprise, car elle leur convenait très bien», fait remarquer Alexandra Afsary. A ajouter à cela des règles moins douloureuses et moins abondantes. Un point qui peut faire pencher la balance chez certaines. En effet, «les règles – qui peuvent être irrégulières, abondantes ou douloureuses selon la méthode – jouent aussi un rôle dans le choix de la contraception», notent les deux spécialistes.
Concernant le patch et l’anneau, tout aussi efficaces, le frein se situe au niveau économique, car ils sont plus chers. Quant au dispositif intra-utérin (DIU), pratique car sans risque d’oubli, il n’est pas forcément bien accepté, étant logé à l’intérieur du corps. Sans oublier des règles irrégulières durant six mois s’il s’agit d’un DIU hormonal. En outre, «il est contre-indiqué chez une femme avec des saignements anémiants ou des troubles du cycle».
Quant au préservatif, moyen de contraception le plus utilisé en Suisse (et le seul à protéger des MST), il n’est pas considéré comme le plus sûr par le milieu médical pour se prémunir contre une grossesse non désirée. Question de comportement. «Oui, il est facilement accessible et à n’utiliser qu’au moment des relations sexuelles. Mais il peut casser, glisser, on peut le retirer au mauvais moment, le garder dans sa poche… Pour que cela fonctionne, il faut avoir anticipé et en avoir sur soi. De plus, le partenaire doit pouvoir l’utiliser correctement et le couple être à l’aise avec la gestion de la pose. Autrement, dès qu’il n’y a plus de risques d’MST, on préférera une contraception quotidenne», admet la conseillère Angela Walder-Lamas.
Pas de risque zéro
«Dans un monde où l’on privilégie le risque zéro», les gynécologues proposent les méthodes hormonales et DIU au cuivre. Les méthodes dites naturelles semblent bien moins citées… «La symptothermie est pourtant valorisée dans de nombreux milieux», souligne Alexandra Afsary. Basée sur l’observation de la glaire cervicale, de la température au réveil et de l’autopalpation de l’utérus, «la technique est sûre, reconnue par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), acceptable pour les plannings familiaux», fait encore remarquer la doctorante. «Elle est fiable, continue Angela Walder-Lamas. Mais on ne la recommande pas à des jeunes de moins de 20 ans ou dans des situations de fragilité, où l’apprentissage pourrait être difficile. Mais s’il y a une forte motivation et implication du couple et qu’elle est en adéquation avec leur situation de vie, pourquoi pas! Elle peut être vécue comme idéale dans une démarche de partage de la charge contraceptive entre partenaires.»
Les méthodes sont-elles toutes aussi fiables?
L’indice de Pearl indique le pourcentage de femmes tombées enceintes en ayant utilisé la méthode en question durant un an. L’efficacité théorique (utilisation parfaite) est comparée à la pratique, aux chiffres toujours plus élevés de par des erreurs d’utilisation (contrainte d’auto-observation, oubli de pilule, usage incorrect du préservatif, etc.). La différence peut aussi varier selon la méthode et le groupe de population étudiés.
Cliquez pour agrandir – Sources: OMS 2011/2015 – Angela Walder-Lamas, Unité de santé sexuelle et planning familial, HUG
La présentation exhaustive des méthodes de contraception en PDF.