7.5.2013, Pascal Vermot / Photo: Jean-Luc Barmaverain
Ces ordures ménagères sont devenues non grata dans de nombreux centres de tri romands. Les particuliers en font les frais.
«On veut nous faire payer le recyclage de l’air à Nyon!» Le cri du cœur de cet adhérent de la FRC traduit bien un certain ras-le-bol. Alors que le principe du pollueur-payeur impose un tri de plus en plus sélectif des déchets, le plastique pèse toujours plus lourd dans les poubelles ménagères taxées, car il n’est pas accepté sous toutes ses formes dans les déchèteries communales. Ainsi les Nyonnais ne peuvent-ils plus déposer de Sagex de moins de 60 centimètres de long au centre de tri local. Ils doivent l’éliminer avec les ordures ménagères. «Un scandale, alors qu’il s’agit d’un matériau 100% recyclable et composé à 98% d’air», tonne-t-il.
Avec l’introduction de la taxe au sac ou au poids, les déchets plastiques des particuliers ne sont pas toujours bienvenus dans les centres de tri. Cela alors que, selon les chiffres de l’Office fédéral de l’environnement (OFEV), chaque Suisse consommait, en 2010, quelque 125 kilos de plastique, dont un tiers provenant des emballages. Certaines déchèteries, comme celle de Fribourg, sont généreuses et acceptent le Sagex, le PET ainsi qu’une foule d’autres polymères: flacons de produits d’hygiène, barquettes de fruits, jouets, gobelets de yoghourt… D’autres se montrent nettement plus restrictives. Comme les consommateurs n’ont pas d’autre choix que de suivre la politique décidée par leur Canton et leur Commune, l’inégalité de traitement est flagrante.
Face à cette disparité, le Canton de Neuchâtel a décidé d’harmoniser quelque peu les pratiques de ses déchèteries, en généralisant, dès mars 2012, la collecte du PET, du polyéthylène (PE), du polypropylène (PP) et du polystyrène expansé (EPS). Une option qui n’est pas sans créer quelques difficultés de mise en œuvre.
«Le nœud du problème, c’est le tri, note Serge Spichiger, responsable du domaine environnement. Le matériau collecté doit être d’une excellente qualité, non composite, et ne doit pas avoir été souillé. Ce qui exclut d’office les barquettes de viande, par exemple. Il faut aussi pouvoir identifier correctement les variétés de plastique. Or le marquage adéquat est parfois difficilement lisible voire inexistant.» Il n’existe actuellement en Suisse aucune obligation légale pour les fabricants ou les distributeurs d’utiliser le système d’identification consacré, pourtant simple pour les consommateurs.
A la difficulté du tri s’ajoute celle du recyclage. Hormis pour le PET et le Sagex en grands volumes, il n’existe pas dans notre pays de réel retraitement et de reconditionnement pour les plastiques. «Nous travaillons depuis fin 2012 à la mise en place de filières de recyclage pour le polyéthylène (PE et PEHD) et les plastiques durs en polypropylène (PP), comme les pots, les caisses et les jouets. Ils sont ensuite exportés pour être reconditionnés, car il n’existe aucune installation de ce type en Suisse», souligne Xavier Prudhomme, directeur de Swiss Recycling Services Suisse.
De son côté, l’OFEV va publier dans les prochains mois l’écobilan du recyclage des plastiques afin de déterminer quelles variétés méritent d’échapper à l’incinération pure et simple. «La revalorisation des matériaux doit être écologiquement et économiquement justifiée», argumente Elisabeth Maret, chargée d’information. D’ici là, l’Administration observe avec intérêt les initiatives de collecte prises au niveau des déchèteries afin «d’identifier quels sont les avantages mais aussi les problèmes posés par le recyclage de plastiques autres que le PET».
Responsabilité des commerçants
Participants forcés d’un système qui en est encore à évaluer ses options, certains consommateurs pointent du doigt les grands groupes de distribution et leurs pratiques de conditionnement. «Depuis la suppression de la collecte des plastiques alimentaires par les Communes, ceux-ci composent l’essentiel de ma poubelle», remarque un de nos lecteurs dans un courrier électronique envoyé à Migros. Le distributeur répond que, s’il n’a «aucune obligation de reprendre tous les emballages» qu’il génère, il prépare la transformation de ses points de collecte, et annonce pour fin 2013 la possibilité de rapporter dans les magasins «toutes les bouteilles en plastique».
«Le client a toujours la possibilité de déposer, une fois passé la caisse, touts types de déchets provenant de ses achats, et pas seulement les plastiques», ajoute Maryvonne Monnier, porte-parole de Migros Neuchâtel-Fribourg. Même son de cloche chez Coop, qui précise que, bien qu’il n’envisage pas de récupérer d’autres plastiques que le PET et les bouteilles de lait et de crème, «nos clients peuvent déposer les emballages après le passage à la caisse», affirme Ramón Gander, porte-parole. En attendant la mise sur pied de réelles filières de recyclage, cette solution, si elle n’est pas plus écologique, représente sans doute le seul levier en main des consommateurs.
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