Argent
Un mois, un défi: quand régler en liquide se paie cash
Archive · 28 janvier 2020

Laurence Julliard
Journaliste
Jamais un sou en poche. Deux cartes de débit – correspondant aux comptes salaire et ménage –, un smartphone et un ordinateur suffisent à mon confort. Pas tout à fait en vrai, car ne jamais avoir de liquide cause aussi son lot d’ennuis. Je me donne donc la chance de changer durablement mon rapport aux transactions.
Le point de départ, de la lassitude devant la suppression massive des guichets et bancomats par ma banque, m’infligeant nombre de kilomètres inutiles et du temps perdu pour obtenir quelques billets; c’est aussi le boulanger qui, parce qu’il refuse une carte à moins de 10 fr. d’achat, m’oblige à renoncer à une bricole ou me pousse à prendre plus que je n’en ai besoin; c’est le pourboire que je ne peux pas donner de la main à la main, la piécette qui me manque pour l’horodateur ou le car wash, le collègue à qui j’oublie parfois de rembourser le repas faute d’être allée au premier distributeur venu et parce qu’il refuse Twint.
L’expérience a démarré par une solide prise de tête. Renoncer aux ordres permanents? Trop extrême. Percevoir le salaire en cash pour m’épargner de passer à la banque? Non plus, la comptable m’aurait sûrement envoyée sur les roses. Définir un budget par semaine ou par quinzaine pour me balader sans trop de valeurs? Limiter les retraits en liquide au nécessaire ou voir large et évaluer comment cela affecte ma manière de vivre? Ah, et trouver une tactique pour séparer budget du ménage et dépenses personnelles, les bons comptes faisant les bons amis.
Les premiers pas ont été faciles. Normal, en période des marchés de Noël. Les petits artisans sont encore à l’ancienne. J’ai eu tout loisir d’apprivoiser mon nouveau rythme; compter la monnaie en retour, c’est bon pour réveiller le calcul de tête. A ce jeu, mon honnêteté a même fait économiser 10 fr. sur des erreurs de caisse. Mais c’est surtout pour les courses que j’y ai trouvé mon compte: j’ai maintenant le bon montant à glisser dans la crousille de l’apiculteur et du négociant en primeurs du coin. Pour la vente directe, je fais ma tournée sans avoir à planifier un ordre de passage, et le temps passé dans la queue à la caisse est l’occasion de faire causette. En plus, je paie comptant la séance d’ostéo et le rendezvous chez l’esthéticienne dont les tarifs sont définis sans devoir vérifier si j’ai assez. Agréable et reposant.
L’art du compromis
Mais j’ai vite déchanté: impossible de voir où filait l’argent sans renoncer au principe de refuser le ticket de caisse. Mes poches se sont gonflées de mitraille (merci à qui m’a rendu 15 fr. en menue monnaie), de tickets de bus (parce que indispensables aux contrôles). J’ai aussi commencé à me mélanger les pinceaux entre l’argent du ménage et le mien: quand l’appareil ne rend pas la monnaie et que le compte est dans l’autre poche, le geste est tentant... Il a donc fallu établir la liste de ce que la gauche doit à la droite, et vice-versa. Perdu une thune oubliée dans un jeans qui a roulé Dieu sait où, retrouvé 60 fr. dans le sac à dos, tout cela a manqué d’organisation! Mais la motivation a eu raison de moi au moment de payer les factures: affronter La Poste au moment des Fêtes m’a fait capituler. Je suis revenue fissa au e-banking.
J’ai terminé le mois sans un rond en poche, avec le sentiment – peut-être à tort puisque je ne suis pas à découvert – d’avoir flambé plus que de raison. Et je ne suis pas parvenue à sensiblement diminuer la fréquence des trajets au bancomat. Faute d’avoir fait l’exercice en décembre, un mois chargé en dépenses? De mal connaître le prix des choses? Une autre cause tient au fait qu’autour de moi, la plupart des gens ont conservé la monnaie virtuelle. Demain sera une histoire de compromis, les postes qui requièrent du cash sont identifiés, je me contenterai de les couvrir.
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