Votation
Sortie du nucléaire: oui, mais quand?
Avant de glisser le bulletin de vote dans l'urne, la FRC a donné la parole aux initiants et à leurs opposants. Au consommateur citoyen de se forger sa propre opinion.
Archive · 04 novembre 2016


Laurianne Altwegg
Responsable Agriculture, Énergie et Environnement
Le 27 novembre prochain, le peuple votera sur l’initiative «Sortir du nucléaire». La FRC soutient l’objectif, estimant que le pays doit se tourner vers les énergies renouvelables et que ses centrales posent des problèmes de sécurité importants. Le renoncement à cette technologie est aussi inscrit dans la Stratégie énergétique de la Confédération, stratégie attaquée par référendum, notamment sur ce point. Les opposants en souhaitent la suppression.
Le point critique de l’initiative soumise au vote repose sur les dates d’arrêt des centrales: ici, les experts s’affrontent sur la possibilité de maintenir un approvisionnement en électricité sûr et abordable en respectant le programme des initiants. Pour laisser le consommateur citoyen se forger sa propre opinion, la FRC a donné la parole aux uns et aux autres.
3 questions à… Roger Nordmann (PS/VD), favorable à l’initiative
Pourquoi ne pas faire confiance à l’Inspection fédérale de la sécurité (IFSN) qui peut décréter la mise hors service des centrales en cas de problème de sécurité?
Le problème, ce n’est pas l’IFSN, mais la faiblesse des moyens légaux dont cet organisme dispose. Au Parlement, l’IFSN nous a demandé de lui octroyer des prérogatives supplémentaires pour imposer des mesures de sécurité aux centrales nucléaires vieilles de plus de quarante ans. Malheureusement, la majorité a refusé de modifier la loi dans ce sens. Pis, Axpo, acteur important dans le négoce d'énergie, attaque en justice l’ordonnance actuelle qui permet de fixer la diffusion maximale de radioactivité admissible en cas d’incident.
Selon toute vraisemblance, l’arrêt des centrales impliquera un accroissement des importations de courant. N’est-ce pas contradictoire au vu du mix électrique de nos voisins (nucléaire, charbon)?
Nos centrales sont vieillissantes et devront être arrêtées un jour. D’ailleurs, actuellement, deux des réacteurs, dont le plus gros, sont à l’arrêt en raison de problèmes de sécurité, et cette interruption se prolongera cet hiver. En réalité, le risque, pour la sécurité d’approvisionnement, c’est de miser à long terme sur des centrales péclotantes. On s’expose ainsi à devoir, de manière imprévue, importer de grandes quantités d’électricité. La fixation d’un planning permet d’installer suffisamment de capacités de production renouvelable. C’est ce qui est prévu dans la Stratégie énergétique 2050. Par contre, si l’on demeure dans le flou, sans date d’arrêt fixé à l’avance ni investissement de remplacement, alors on tombera à coup sûr dans l’importation de courant sale.
Les délais d’arrêt des centrales prévus par l’initiative sont-ils réalistes en regard de la sécurité d’approvisionnement et de la capacité du réseau à supporter davantage d’importations?
Techniquement, depuis soixante ans, nous sommes étroitement reliés avec les pays voisins, et la capacité du réseau 380 kilovolt (kV) permet sans difficulté d’importer d’énormes quantités d’électricité, comme par exemple cet hiver avec la panne de la centrale de Leibstadt, en Argovie. Des renforcements ponctuels sont souhaitables à Beznau (AG) et Mühleberg (BE) pour assurer la redondance, car ces centrales alimentent un vieux réseau à 220kV. Vu que Beznau 1 ne redémarrera sûrement pas, comme l’a indiqué la Conseillère fédérale Doris Leuthard, Swissgrid a dû accélérer ses investissements de manière à être prêt au printemps 2017. Concrètement, il s’agit d’installer sur le site de Beznau des transformateurs qui relient les réseaux de 220kV et 380 kV. Le fait que ces travaux aient été décidés dans l’urgence illustrent le déficit de planification. Et c’est précisément là l’avantage de l’initiative: elle oblige à planifier.
3 questions à…Benoît Genecand (PLR/GE), opposé à l’initiative
Garder nos centrales nucléaires en activité alors qu’elles présentent de plus en plus de problèmes de sécurité ne représente-t-il pas un risque inconsidéré pour les générations actuelles et futures?
Si les centrales présentent des problèmes de sécurité, elles sont arrêtées. Si ces problèmes ne peuvent être levés, elles ne démarrent pas: c’est le système actuel. Une autorisation d’exploiter illimitée soumise à une condition non négociable de garantie de sécurité. Mühleberg sera arrêtée en 2019 parce que le propriétaire n’a pas voulu faire les investissements exigés pour maintenir un haut niveau de sécurité. Beznau 1 est arrêtée pour des microfissures. Soit ces microfissures sont sans risque du point de vue de l’organisme neutre de contrôle et l’activité de Beznau reprend. Soit la sécurité n’est pas garantie et Beznau est désaffectée. Ces exemples sont la preuve de la solidité du système en place. Ajouter un âge limite rend le système moins stable et donc moins sûr.
Sachant que l’abandon du nucléaire fait déjà partie de la Stratégie énergétique 2050, quels sont les arguments qui s’opposent à l’accélération de l’arrêt des centrales en activité?
Accélérer la sortie, c’est abandonner une production sûre d’électricité avant terme. La question est donc: par quoi la remplaçons-nous? Les renouvelables permettront au mieux de couvrir la moitié du nucléaire d’ici 2035. Le reste devra être importé de France (électricité nucléaire à 76%) ou d’Allemagne (électricité produite à base de charbon, de gaz ou de nucléaire à 70%). Cela sans compter que les renouvelables (surtout le photovoltaïque) posent des défis de continuité du courant et de distribution qui sont loin d’être surmontés.
Les échanges d’électricité avec nos voisins sont déjà la norme aujourd’hui. En quoi une augmentation des importations poserait-elle problème en cas d’arrêt des centrales nucléaires?
La Suisse est dépendante en matière d’hydrocarbures. Complètement dépendante. Elle est en revanche indépendante dans sa production d’électricité, et ce depuis la révolution industrielle. Les échanges avec nos voisins sont intenses et bénéfiques. La question reste: produisons-nous assez d’électricité pour notre consommation nationale. Sommes-nous autonomes? Avec le mix actuel basé sur l’hydraulique et le nucléaire, la réponse est oui. Si nous votons oui à l’initiative, la réponse sera non dès 2017 et pour longtemps. Or garder notre autonomie en matière de production d’électricité est une priorité.
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