Pop conso
Shein cherche à se racheter une réputation
Micro dans une main, questions dans l’autre, Magali Berdah, 43 ans, arrête des passants dans les rues parisiennes.
06 juin 2025
Jessica Monteiro
Journaliste
«Que pensez-vous de cette citation de Shein La mode est un droit, pas un privilège?» ou «Saviez que Shein produit à la demande?» Face à elle, des personnes conciliantes, prêtes à écouter ses arguments, agréablement surprises d’apprendre les efforts de Shein pour améliorer l’accessibilité de la mode.
Magali Berdah, papesse de l’influence, n’est autre que la fondatrice de Shauna Event, l’agence derrière la carrière de plusieurs candidats emblématiques de la téléréalité. Environ 1,8 million de personnes suivent la Française sur Instagram. Elle a publié en mai dernier plusieurs capsules vidéo vantant les mérites du géant chinois de la fast-fashion. En légende de chaque vidéo figure la mention «collaboration commerciale» avec Shein France, indiquant une rémunération pour ces publications (conformément à la loi française encadrant l’influence commerciale).
Shein recourt massivement aux services d’influenceurs et influenceuses pour atteindre le plus de personnes possible. En 2022, le géant de la fast-fashion apparaissait dans les vidéos de plus de 1000 influenceuses, ce qui représente une audience d’environ 10 millions de personnes. Shein franchit un nouveau cap, en utilisant l’influence comme outil de lobbying.
Car les vidéos de Magali Berdah remettent en question la proposition de loi française visant à réduire l'impact environnemental de l'industrie textile: «Saviez-vous qu’elle semble viser particulièrement Shein et sa clientèle?» demande-t-elle à chaque vidéo. Elle insiste: «L’objectif de proposition de loi est primordial, les enjeux sont urgents», mais la manière de procéder ne serait pas la bonne.
Que dit cette fameuse la loi en cours d’examen? Le texte vise à réglementer la pratique de la fast fashion, soit «la mise à disposition ou de la distribution d’un nombre élevé de nouvelles références de vêtements ou d’accessoires neufs sur un temps donné dépassant certains seuils. Ces seuils chiffrés seront fixés par décret.» Sont concernées des entreprises mais aussi des places de marché (marketplace), comme Temu ou Alibaba. Une disposition inclut l’introduction de primes ou de pénalités sur les produits et accessoires textiles en fonction de leur éco-score. Les produits au plus mauvais impact environnemental seront soumis à des taxes, dont le montant s’élèvera à 10 euros par article en 2030.
Une pénalité dont se sert Magali Berdah dans ses vidéos comme argument: «La taxe ne rendra pas la mode plus responsable, mais moins accessible.» Par des tournures de phrases subtiles et quelques sophismes, elle déroule la nouvelle rhétorique de Shein, qui cherche à se distancier de son image d’entreprise ultrapolluante. En mars dernier, la FRC a analysé en vidéo les ressorts de cette stratégie. L’entreprise a vendu pour 45 milliards de dollars (37 milliards de francs) de vêtements en 2023.
En engageant Magali Berdah, Shein transmet son message à travers une figure reconnue sur les réseaux sociaux. Dans les vidéos, la papesse de l’influence fait passer le fabricant comme indispensable pour les classes moyennes et pauvres. Sans jamais mentionner les conditions de fabrication, la présence de produits nocifs pour la santé dans les tissus, ou encore la dépendance créée par la mauvaise qualité textile – poussant au rachat régulier.
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