Santé

Qualité des soins: quelle définition?

La question de la qualité des soins apparaît dans l'arène publique sous la pression de l'augmentation des coûts de la santé, que tous les acteurs tentent de contenir. Mais chacun défend sa version et ses intérêts. Et les assurés?
Santé Assurance-maladie Prestataires de soins

Archive · 07 janvier 2009

La qualité: dans un système de santé en pleine effervescence, le mot a toutes les apparences d'un nouveau Graal. Du médecin à l'assureur, du parlementaire au pharmacien, pas un intervenant du domaine médical n'échappe à "la" quête du moment. Et le consommateur? Tour à tour patient, client, assuré, il est aussi citoyen. Or, à près de 70%, les Suisses ont dit non en juin à un changement radical du système de santé en refusant l'article constitutionnel "qualité et efficacité économique dans l'assurance maladie". Seront-ils écoutés?

Rien n'est moins sûr. Car la qualité a presque autant de définitions qu'il y a d'intervenants dans le monde médical, suscitant ainsi des débats complexes où les intérêts sectoriels risquent de prendre le pas sur la définition commune d'un système juste et efficace pour tous. Dans le dossier qui suit, FRC Magazine fait un état des lieux en questionnant les acteurs majeurs de la scène médicale suisse.

Votre médecin va-t-il bientôt vous vendre lui-même les médicaments qu'il prescrit, juteuse commission en prime? Votre assureur peut-il utiliser votre diagnostic médical pour vous vendre une police? Est-il utile que vous connaissiez l'espérance de vie dans chaque hôpital au jour près pour choisir un établissement? Aurez-vous encore longtemps le droit de choisir un médecin vous-même? Chez combien de prestataires différents faudra- t-il vous rendre pour déterminer votre taux de cholestérol et trouver le traitement adéquat?

Débats tendus

Ce sont ces questions, parmi bien d'autres, qui transparaissent derrière l'idée apparemment anodine de "qualité des soins". De fait, en raison des progrès de la médecine, du vieillissement de la population et de la complexité du système administratif, la santé coûte cher, de plus en plus cher.

Or, si les besoins sont potentiellement illimités, les ressources, elles, ne le sont pas. "Le débat actuel vise à établir des critères permettant d'allouer les ressources de manière raisonnée", résume le chirurgien Daniel Herren, responsable de la réflexion sur la qualité au sein de la FMH (Fédération des médecins suisses). Mais le praticien avertit d'emblée: "La définition de ces critères de qualité en médecine varie selon que l'on se place du point de vue du médecin, du patient ou de l'assureur." Par exemple, pour le médecin, la qualité des soins qu'il prodigue dépendra de sa formation initiale et continue, du contexte de régulation dans lequel il évolue, etc. Le patient sera plus probablement attentif, lui, à la satisfaction qu'il retire du soin donné, à la relation de confiance avec son médecin, à la rapidité avec laquelle il peut accéder aux prestations. Ainsi, bien que les prestataires de soins reconnaissent tous l'intérêt à tenter de mesurer la qualité de leur travail, la pression sur les coûts semble déterminante dans l'arrivée sur la place publique de la question de la qualité.

La qualité, forcément chère?

"Parmi plusieurs possibilités pour trouver des critères d'attribution des ressources, il existe celle de payer moins pour une qualité inférieure. C'est l'option prise par les assurances, et cela explique pourquoi le débat sur la qualité est tendu et pourquoi il doit être abordé avec prudence", avertit Daniel Herren. Une médecine de qualité est-elle dès lors nécessairement chère? "Non, répond Anne- Marie Bollier, déléguée romande de l'Organisation suisse des patients. La qualité est une optimisation du rapport entre le prix du système et les bénéfices que les patients en tirent." Pour Dominique Jordan, président de Pharmasuisse, l'organisation faîtière des pharmaciens, c'est même le contraire qui est vrai: "Tout ce qui n'est pas d'une qualité prouvée est trop cher, car potentiellement inefficace, voire dangereux. Une médecine de qualité est basée sur la recherche de l'efficacité maximale aux moindre coût." Mais ce à une condition, qui n'est pas remplie aujourd'hui: "Le système de rémunération du fournisseur doit être conçu de manière à encourager cette efficacité. Actuellement, les assureurs demandent aux soignants: "Soyez plus efficaces, afin que nous puissions vous payer moins l'année prochaine. C'est le fiasco garanti!""

Les caisses maladies, gardiennes de la qualité?

Pour Nello Castelli, membre de la direction de Santésuisse, l'organe faîtier des assureurs, l'évaluation de la qualité des soins n'est pas encore suffisamment mise en application: "Elle constitue pourtant un objectif des lois actuelles", explique-t-il. Pour faire avancer les choses, Santésuisse est donc "décidée à ne plus signer de convention tarifaire avec les prestataires de soins sans s'entendre avec eux sur le contrôle de la qualité." Ainsi, si la question de la qualité est réglée par la loi, les prestations remboursées dans le cadre de l'assurance de base sont-elles suffisantes pour permettre une médecine de qualité? "Le catalogue de base permet dans son ensemble une correspondance forte avec les critères de qualité des soins, répond le conseiller national Jean-François Steiert. Parmi les domaines où cette adéquation n'est pas donnée, on peut toutefois relever les soins dentaires et la psychothérapie. Par ailleurs, l'accès limité aux soins pour certaines catégories d'assurés et le caractère peu social du système de financement continuent de poser problème. "

Pour les assurés, la promotion de la qualité est cependant vécue différemment, si l'on en croit les appels passés auprès de la Permanence FRC. Beaucoup se disent choqués par les pratiques de certaines assurances. Désireux de s'attirer de nouveaux clients, si possible peu coûteux, et de chasser les malades de leur portefeuille, les assureurs frisent souvent le code. Harcèlement publicitaire, démarchage à domicile, rétention d'information: certaines pratiques semblent autant éloignées des buts de la Lamal que de la recherche d'une médecine de qualité.


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