Droit des patients

Le cas de l’erreur médicale

Personne n’est infaillible, mais lorsque le chirurgien charcute ou que l’anesthésiste surdose, le patient doit réagir vite, malgré ses souffrances.
Santé

Archive · 30 août 2016

Il est essentiel de vérifier avec son médecin qu'on s'est bien compris - sfam_photo/shutterstock.com

Traîner son médecin en justice n’est pas un objectif. En revanche, agir en amont, poser toutes les questions nécessaires à une bonne compréhension du traitement, de son efficacité et des risques sera bénéfique pour tout le monde.

Les malentendus sont, en effet, à l’origine de nombreux conflits, explique Barbara Züst, codirectrice de la Fondation Organisation suisse des patients (OSP): «Tout traitement médical suscite des attentes conscientes ou inconscientes et, souvent, patients et médecins ne réalisent pas à quel point leurs conceptions de la maladie et de sa guérison divergent.» Il est donc essentiel de vérifier avec son médecin qu’on s’est bien compris.

Check-list

Questions à poser au médecin avant

✔ Quels sont les bénéfices attendus du traitement? Sont-ils clairement supérieurs aux risques et effets secondaires?
✔ Existe-t-il une alternative? Que se passe-t-il si on ne fait rien?
✔ Où trouver de la documentation et où demander un second avis?
✔ L’intervention prévue est-elle souvent pratiquée? A quelle fréquence la faites-vous?
✔ Qui opérera du début à la fin de l’intervention et qui s’occupera du suivi?
✔ Quelle sera la prise en charge par les assurances?

Et n’hésitez pas à prendre des notes!

Si malgré ces précautions l’intervention tourne mal ou ne donne pas satisfaction, il faut le signaler immédiatement: un conflit ne se résout pas en attendant que «les choses se tassent». D’abord, analysez le problème pour mieux le cerner. Commencez par dresser une liste des principaux points qui n’ont pas correspondu à vos attentes. Demandez ensuite un entretien avec le médecin, et n’hésitez pas à vous faire accompagner par une personne de confiance.

Médiateurs et protection juridique

Si vous vous sentez incompris, adressez votre réclamation – toujours par écrit et en recommandé – au praticien, en gardant une copie du courrier. La brochure L’essentiel sur le droit des patients, éditée par les Services de la santé publique romands, sera un bon guide, tout comme le site droitsdupatient.ch.

Besoin d’un coup de main? Si votre but est de clarifier la situation, une médiation suffit souvent. Les hôpitaux universitaires de Lausanne (CHUV) et Genève (HUG), ainsi que certaines associations médicales offrent des espaces de discussion et mettent gratuitement des médiateurs à la disposition des patients et de leurs proches.

En revanche, lorsque le patient a l’impression de subir un dommage important, il est recommandé de faire évaluer le cas par un organisme indépendant de défense des patients, par exemple par l’OSP (spo.ch) ou la Fédération suisse des patients (federationdespatients.ch). Pour bénéficier de leur soutien, l’affiliation est parfois indispensable, mais le prix raisonnable: dès 60 fr. Enfin, les assurances de protection juridique peuvent également servir. Elles travaillent d’ailleurs fréquemment en collaboration avec les organisations de patients. A noter toutefois qu’elles n’assumeront les coûts que si l’assurance a été conclue avant l’incident.

«Agir sans attendre est aussi important afin de ne pas laisser passer le délai de prescription, avertit Rebecca Ruiz, présidente pour la Suisse occidentale de la Fédération suisse des patients. Ces délais sont totalement incohérents et sources d’injustice entre patients, car selon le type de dommage, l’hôpital où cela s’est produit ou selon le canton, ils varient entre un et dix ans. Un vrai casse-tête!»

Mieux vous défendre

Erreur ou simple complication ?

L’erreur est humaine, mais pour le médecin, ou son employeur, il est aussi tentant de la passer sous silence en parlant simplement de… complication. Raison pour laquelle une expertise médicale est souvent nécessaire afin de clarifier de quoi il retourne.

Ces examens peuvent se faire «à l’amiable» en passant par le bureau d’expertises extrajudiciaires de la Fédération des médecins suisses (FMH). En 2015, il a ainsi procédé à 67 expertises, dont 29 ont conclu à une ou plusieurs fautes de diagnostic ou de traitement. Or, seul le patient est habilité à déposer une demande, et sous quatre conditions: il a subi une atteinte considérable à sa santé; aucun accord n’a été trouvé entre les parties; le dommage n’est pas d’ordre purement esthétique; aucun tribunal n’a encore été saisi ni n’a prononcé de jugement.

Autre frein, le patient doit s’acquitter d’une taxe administrative qui est passée de 600 fr. à 1000 fr. le 1er mai 2016. Et si la responsabilité du médecin est rejetée et qu’il n’y a pas de dédommagement, les honoraires de l’avocat et de l’expert sont à la charge du patient, sauf si la plainte est portée devant un tribunal. «Cette procédure est rarement recommandée, car les chances d’aboutir sont incertaines, explique Barbara Züst de l’OSP. Enfin, pour les patients, l’incertitude quant à l’issue de la procédure et la longueur de celle-ci sont souvent vécues comme un traumatisme supplémentaire.»

Si bien que les plaintes devant un tribunal sont encore assez rares. Selon l’OSP, une plainte civile ne vaut la peine que dans 1 à 2% des cas. Quant au pénal, la procédure s’avère plus nuisible que profitable, car si l’on dépose plainte pour lésions corporelles ou homicide par négligence (Code pénal, art. 117 et 125), le médecin est souvent injustement criminalisé. Cela empêche d’aborder les erreurs médicales de manière constructive et surtout d’y remédier.

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