27.6.2023, Sandra Imsand / Photos: Jean-Luc Barmaverain
À qui faire appel pour réaliser de menues missions chez soi ? La branche s’est fortement développée, mais il est difficile de faire le tri entre des offres aux prix très différents et des acteurs qui ne présentent pas tous le même sérieux.
Fixer une étagère, peindre un petit bout de mur, installer une machine à laver. Ces menus travaux nécessitent du temps, du matériel, des compétences et des capacités physiques. Ils ne sont donc pas forcément à la portée de tout le monde. Certains font appel au système D: coups de main entre voisins ou dans la famille, visionnage de vidéos YouTube pour apprendre à se débrouiller. Mais il s’est aussi créé un véritable marché autour de ces services à domicile. Sites et applications en ligne mettent en lien artisans ou bricoleurs avertis et personnes en demande de soutien ponctuel. Mais que peuvent valoir ces prestataires? Quelles sont les conséquences à laisser entrer chez soi une «personne à tout faire»? Et s’il y a un accident, un incident durant l’intervention, qui en porte la responsabilité?
Les trois scénarios de notre enquête: «Scénario montage», «Scénario jardinage», «Scénario déchetterie»
Beaucoup de zones d’ombre
Ce marché en pleine croissance représentait 18 milliards de chiffre d’affaires en France en 2019. L’enjeu est important: le vieillissement de la population et l’allongement de l’espérance de vie fourniront à l’avenir encore de nombreux débouchés au segment de la silver economy, soit l’ensemble des activités destinées aux plus de 50 ans. Toutefois, les plus jeunes s’y intéressent également en raison de l’évolution des modes de vie. Ainsi, aux États-Unis par exemple, le service à la personne est une branche qui connaît actuellement une croissance d’environ 7% par an.
«Le montant moyen des offres pour fixer du mobilier ou jeter des encombrants est compris entre 200 et 300 francs.»
Le secteur de la santé, de la livraison de repas ou du nettoyage est plutôt structuré, avec des acteurs connus, reconnus et validés. D’autres sont plus nébuleux. À qui s’adresser pour obtenir de l’aide dans les tâches qui sortent de l’ordinaire? «Il n’existe pas vraiment de vision coordonnée, explique Karine Tassin, responsable Information et bénévolat chez Pro Senectute Vaud. Les besoins sont sans doute là, mais nous n’avons pas beaucoup de demandes en ce sens.»
Raison pour laquelle, la FRC a mené l’enquête en Suisse romande en collaboration avec Pro Senectute, dans l’idée d’affiner les perceptions. Pour débusquer les prestataires éventuels, tout commence par un petit tour sur un moteur de recherche, comme le ferait un client potentiel. Premier constat: l’offre n’est pas pléthorique. La FRC a identifié une vingtaine de plateformes ou de sites d’artisans capables d’effectuer ce type de missions dans les cantons romands.
Une trentaine de nos clients mystères devaient leur demander des devis concernant des travaux. Ces derniers étaient classés en trois scénarios. Certaines entreprises ont été contactées par plusieurs enquêteurs d’âge différent. L’idée sous-jacente était d’évaluer les prix, les précisions demandées et l’impression de sérieux laissée par les réponses. Le travail n’a pas été de tout repos: plus d’un mois après la prise de contact, une dizaine d’enquêteurs n’avaient pas obtenu de devis ou tout simplement pas de réponse!
«Le devis pour tailler une haie est assez aléatoire dans les offres reçues et oscille entre 200 et 2000 francs.»
Intermédiaires pas faciles à évaluer
Certaines plateformes proposaient de mettre en commun personnes et prestataires. Dans le cas de NeedHelp, un enquêteur a utilisé le scénario Déchetterie. Il a reçu pas moins de huit réponses, émanant aussi bien d’entreprises établies que de professionnels ou de passionnés de bricolage. Pareil chez Renovero, avec le scénario Montage de meubles ou Jardinage. Il faut parfois contacter une à une chaque entité pour obtenir des clarifications, car les réponses peuvent être très lacunaires. Les prix sont également difficiles à évaluer. Ainsi, pour une même prestation de montage de meubles et fixation de lampes et étagères, les propositions allaient de 65 à 350 francs. Pour un transport à la déchetterie, les devis tournaient autour des 300 francs et pour la taille de la haie, la seule offre chiffrée se montait à 1600 francs. Un enquêteur témoigne: «Je me suis senti en confiance avec NeedHelp, couverte par Axa.
«Se tourner vers son réseau informel a plusieurs avantages, il rassure et crée du lien social.»
On touche à une économie en partie souterraine, mais les prestataires semblent motivés et fiables La coordinatrice du site m’a appelé pour me signaler que j’avais reçu des offres, ça m’a plu.» Par ailleurs, sur cette plateforme, le règlement se fait en ligne directement, sans échange d’argent entre les acteurs. Même sentiment de confiance pour nos enquêteurs à propos de Renovero, entreprise rachetée en 2010 par Localsearch (Swisscom). Le système d’évaluation des entreprises ainsi que le suivi de la plateforme sont un plus. Une enquêtrice a cependant relevé que le fait de correspondre en ligne ne permettait pas de savoir qui viendrait chez elle. La concernant, c’était un facteur d’insécurité.