Bien-être
Luminothérapie: les lampes qui manquent de pêche
Archive · 10 novembre 2020


Anne Onidi
Journaliste scientifique
Les jours raccourcissent, et avec les minutes de lumière perdues, l’entrain s’étiole et la tristesse s’accorde une plus grande place dans la palette des humeurs. Fréquemment, cet état s’accompagne d’hypersomnie et de fringales incontrôlables générant une prise de poids. Alors qu’elle affecterait plus de 16% des Scandinaves, la dépression saisonnière toucherait 3% des Suisses, parfois dès octobre déjà. En cause, le manque de lumière, 5 à 25 fois moins forte qu’en été. Or cet élément joue un rôle important dans la régulation des hormones et du cycle du sommeil et lorsqu’il se fait rare, il peut engendrer une véritable maladie aux symptômes extrêmement pénibles.
10 000 - Le nombre de lux minimum nécessaire.
Née dans les années 1980, la luminothérapie a mis du temps à s’imposer pour le traitement de cette pathologie. A présent, c’est une méthode établie, aussi reconnue pour soigner d’autres types de dépression et traiter les troubles du sommeil. Sylfa Fassassi, médecin au service de psychiatrie générale du Centre hospitalier universitaire vaudois, à Prilly (VD), y a souvent recours: «Cela fait deux ans que nous prescrivons plus largement la luminothérapie. Des études récentes ont montré son efficacité dans le traitement de la plupart des dépressions.» Ce que confirme Marie-Joëlle Stauffer-Corminboeuf, infirmière à l’Unité des troubles de l’humeur des Hôpitaux Universitaires de Genève. «Nous l’utilisons souvent pour la dépression saisonnière. Mais également dans des cas de dépression légère à moyenne ou lorsqu’un patient ne peut ou ne veut pas recevoir de médicaments.» Efficace, cette méthode de soin, mais aussi facile à mettre en œuvre. Pour bénéficier de ses effets, il suffit de s’exposer à la lumière directe de la lampe 30 minutes par jour le matin, en prenant le petit-déjeuner ou en lisant le journal.
Encore faut-il que la lampe fournisse un éclairement suffisant. Pour que l’effet soit réel, il faut compter 10 000 lux à une distance confortable, soit un minimum de 30 cm. Si l’éclairement est inférieur, l’exposition doit être prolongée, ce qui rend le traitement nettement plus contraignant. Si l’on divise l’éclairement par deux, c’est le temps d’exposition que l’on doit doubler.
Dans la grande distribution, tous les emballages de lampes de luminothérapie revendiquent un éclairement de 10 000 lux. Mais rares sont ceux qui précisent à quelle distance la valeur est atteinte. Les chiffres des fabricants sont-ils exacts? Les lampes éclairent-elles suffisamment à une distance confortable? C’est ce que nous avons mesuré.
Sur 25 modèles référencés dans les grandes enseignes, nous en avons sélectionné huit, de marques variées et incluant deux modèles, Beurer et Medisana, les leaders du secteur. Vendues entre 59 et 217 francs, ces lampes ont également des formats distincts. Nous les avons confiées au laboratoire d’optique de l’Institut fédéral de métrologie Metas. Là, les spécialistes ont mesuré l’éclairement à différentes distances définies par les fabricants. Ils ont fait de même, pour tous les appareils, à des distances fixes de 30 et de 50 cm. Enfin, ils ont déterminé à quelle distance les 10 000 lux étaient assurés.
Mensonge, non, cachotteries, si
Vérification faite, les fabricants ne mentent pas sur les performances de leurs appareils. Les valeurs d’éclairement mesurées correspondent bien à celles indiquées et les dépassent même parfois. C’est donc un bon point à saluer. Mais un fait beaucoup plus déplaisant est à relever: pour obtenir l’information, il faut aller fouiller dans le mode d’emploi des appareils, rarement consulté avant l’achat. Car l’emballage fournit des indications lacunaires: tous affichent des éclairements de 10 000 lux, mais seul un (Lumie Vitamin L) précise la distance nécessaire. Or, omettre cette donnée revient un peu à indiquer le nombre de calories sur l’emballage d’un aliment sans préciser la ration à laquelle le chiffre se rapporte.
30 cm - La distance idéale pour un effet réel.
C’est justement là que réside le principal problème de ces appareils: ils n’éclairent pas suffisamment. Le plus performant, le Lumie Vitamin L, offre un éclairement de 10 000 lux à 21 cm, une distance difficile à maintenir. Et avec la lanterne rouge du test, le Taotronics Touch & Shine, c’est à 10 cm du visage qu’il faut «coller» la source de lumière pour profiter de ses bienfaits. A 30 cm, les deux modèles les plus performants offrent à peine plus de la moitié de lumière prescrite. Nous avons néanmoins fait le choix délibéré de considérer leur éclairement comme bon, de justesse, pour les distinguer des autres. Mais leurs résultats ne leur permettent pas d’être considérés comme des appareils de choix dans le traitement de la dépression saisonnière. Pour cela, il faudra envisager de se tourner vers un commerce spécialisé (lire ci-dessous).
Voir le test des lampes de luminothérapie sur test.frc.ch
Avis d’experte
« La luminothérapie doit s’effectuer quotidiennement. »
Bénédicte Wildhaber Directrice de Medi-Lum, à Neuchâtel.
Quel regard posez-vous sur le marché de ces lampes?
Un regard positif: la technologie a bien évolué et permet d’offrir de bonnes lampes pour 150 à 300 fr. alors qu’on était autour de 700 fr. il y a quelques années. Ce marché souffre néanmoins de confusion, car il est parfois difficile de connaître l’éclairement réel de ces objets. Enfin, le recours aux LED comme source de lumière nécessiterait peut-être de re-clarifier le dosage lux-distance pour certaines indications.
Quels conseils donneriez-vous à une personne qui se plaint d’une baisse légère de forme et d’humeur?
Je lui dirais de tenir compte de trois critères: la présence du marquage CE suivi de quatre chiffres, assurant un usage en toute sécurité chez soi; l’éclairement lumineux, adapté aux besoins, en partant d’un minimum de 2000 lux à 30 cm; et le format, qui doit permettre une utilisation le plus souvent tôt le matin sans trop contraindre le mode de vie.
Cela s’applique-t-il à une dépression saisonnière?
On ne peut pas plus faire abstraction du contexte. Si le patient n’a pas de grande lampe, il y a des compromis à faire sur le dosage, à discuter avec le médecin. L’important est de pouvoir effectuer la luminothérapie quotidiennement ou presque, le temps de la cure choisie.
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