Restauration

Label Fait Maison: dans la peau d’un contrôleur

Visite inopinée dans un restaurant labellisé avec un bénévole qui a de la bouteille.
Alimentation

Archive · 12 mars 2019

Le chef Gaëtan Joly démontrant à René Carrel qu’il mise sur la fraîcheur et la proximité pour séduire les papilles de sa clientèle.

Attablé dans un coin de la brasserie, René Carrel sort son carnet. «Je travaille à l’ancienne», nous explique ce bénévole chevronné, tout en feuilletant ses nombreuses pages griffonnées. Restaurant – en l’occurrence Le Petit Corbeau, à Chavornay (VD) –, adresse, nom du patron, numéro de téléphone, heures d’ouverture, tout y figure. «Il faut être préparé pour ce type de visite», considère-t-il. Ce travail justement, c’est celui de contrôleur pour le compte du Label Fait Maison.

Ce midi, René Carrel est attablé incognito. Manger sur place n’est pas une étape inscrite dans le cahier des charges du label, mais «on peut sentir le lieu, l’ambiance. Et rencontrer des gens qui aiment leur métier, qui vous serrent la main et vous demandent si tout s’est bien passé.» Des détails essentiels pour cet ancien directeur d’une société de mobilier de bureau, qui s’y connaît en «relations publiques». La poignée de main sera donnée avant de regarder le menu. Notre contrôleur apprécie.

Face au rôti fumant, il sort son smartphone, prend une photo de l’assiette, «pour le souvenir». En seize mois, le bénévole en a découvert des lieux, il en a vu passer des plats. Et son palais s’est affiné. En l’occurrence, ce repas-ci est loin d’être industriel. «Déjà, on le voit à la feuille de laurier. Et je vous avouerai que je ne supporte pas les sauces qui ne sont pas fraîches!» Lorsque les trois desserts sont annoncés faits maison, il nous lance un petit clin d’oeil. Il est temps de dégainer la carte de visite et de dévoiler enfin sa vraie nature.

Le travail commence par la vérification de la carte. Si le logo du label y trouve une place de choix, la mention expliquant que les mets sont élaborés selon des critères définis n’y est pas. Bryan Lauper, le patron, s’excuse. Il préfère mettre en avant ses produits plutôt que de se tracasser avec l’administratif. Mais promet que cela sera corrigé au plus vite. Le contrôle continue dans la cave, où le chef Gaëtan Joly expose oranges, poires, persil, salades, beaux navets des producteurs d’à côté… «Des denrées brutes et aussi de première fraîcheur, même si le label n’en exige pas tant car les légumes pourraient aussi bien être congelés », commente René Carrel. Les pommes de terre, elles, sont spécialement choisies pour en faire des frites, notet- il encore de son oeil avisé. «On a de beaux produits, c’est un plaisir de les travailler», sourit le chef en sortant un sac rempli de foin. «Quand on a le temps, on le fait cuire dans l’eau des patates.» Une astuce goûteuse que le bénévole passionné de bonne chère reproduira assurément.

La visite se poursuit en cuisine, où légumes, jus, fromages et autres aliments semblent être complètement en ordre. «Tout ce que vous avez là est autorisé: bravo!» se réjouit René Carrel. L’autocollant apposé sur la devanture de l’établissement est bel et bien mérité et Bryan Lauper en est fier. «Pour nous, un tel label est juste logique. La cuisine, c’est ça. Et ce devrait être une évidence pour tous.»

L’expérience de...

Noémie Pala, bénévole de la première heure pour les établissements du Jura

Qu’est-ce qui vous a donné envie de vous investir dans le Label Fait Maison?

Je fais partie du Comité de la FRC Jura, et je me suis toujours intéressée aux enquêtes ainsi qu’aux produits du terroir! Voir comment ça se passe dans la restauration, la transparence sur les cartes et dans l’assiette, avoir un contact privilégié avec les acteurs de la branche sont autant d’arguments qui m’ont parlé.

Satisfaite de l’expérience?

Tout ce qui touche à la nutrition me parle. Se pencher sur la composition des aliments, découvrir ce qu’il y a dans les plats, estimer ce qui a été élaboré sur place est enrichissant. Constater ce que les restaurateurs considèrent comme fait maison l’est aussi. J’ai pris conscience du principe de réalité, et des difficultés auxquelles ils font face: contraintes de personnel, de temps, de stockage…

De quoi rendre la tâche plus compliquée?

Notre travail est clair, nous avons des supports sur lesquels nous appuyer. En revanche, le contact avec le restaurateur n’est effectivement pas forcément évident. Avec certains, c’est super. Mais d’autres ne sont pas toujours d’accord avec les critères du label. Il faut avoir de la répartie, mon travail d’assistante sociale m’y aide! Malgré tout, s’il peut y avoir des revendications, il n’y a jamais de gros soucis; parmi la douzaine de restaurants visités, seuls deux ont finalement décidé de ne pas s’engager. Vous ne vous êtes occupée que des contrôles initiaux (visite pour finaliser la demande d’adhésion, ndlr) jusqu’à présent.

Les contrôles inopinés vous font peur?

Si un établissement demande à avoir le label, c’est qu’il le souhaite. Je suis convaincue qu’il ne changera pas de manière de faire dans les deux ans qui suivent son affiliation. Aller leur rendre visite à l’improviste ne m’inquiète pas du tout!

Liste des restaurants labellisés et événements 2019: labelfaitmaison.ch

Pratique: le label en bref

• L’association constituée en septembre 2017 regroupe la FRC, initiatrice du projet, ainsi que GastroSuisse, Slow Food et la Semaine du Goût.

• L’objectif: promouvoir une cuisine de qualité, mitonnée sur place avec des produits bruts.

• Les restaurateurs s’engagent sur une base volontaire. Ils sont près de 300 en Suisse romande.

• Les bénévoles de la FRC se chargent des visites pour les demandes d’affiliation et effectuent des contrôles inopinés par la suite. Ils se rendent dans les cuisines, les économats, les chambres froides et congélateurs.

• Les clients peuvent se fier à l’autocollant apposé sur les devantures, ainsi qu’à la carte qui signale clairement quel mets ne répond pas aux exigences du label.

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