Tendance
La cote des médecines complémentaires
Archive · 05 juin 2012

Le constat est sans appel: sur les 70 officines romandes visitées lors de notre enquête, le premier réflexe d’une écrasante majorité de pharmaciens est de proposer des préparations «douces» face aux insomnies passagères. A savoir en majorité des tisanes (29 cas), suivies par de l’homéopathie (18) et de la phytothérapie (14). Un résultat plutôt en adéquation avec la sensibilité des Suisses, grands adeptes des médecines complémentaires – terme consacré par l’OMS –, selon la dernière Enquête suisse sur la santé publiée par l’Office fédéral de la statistique.
Autre manifestation de cet engouement, la volonté populaire, en 2009, d’adopter un article constitutionnel intégrant les médecines complémentaires, un vote plébiscité à 67%. Aujourd’hui, cinq d’entre elles – médecine anthroposophique, homéopathie, thérapie neurale, phytothérapie et médecine traditionnelle chinoise – sont remboursées, sous certaines conditions, par l’assurance de base. Cela durant une période d’essai de cinq ans; Berne se laissant jusqu’à 2017 pour analyser les aspects controversés de ces traitements, telles leurs «efficacité, adéquation et économicité».
L’UNIL innove
«Les opinions dans le domaine peuvent virer du côté des convictions presque religieuses», souligne Walter Stüdeli, de la Fédération de la médecine complémentaire. Mais les mentalités, notamment scientifiques, évoluent. En témoigne la création, en 2011, d’une Unité d’enseignement et de recherche sur les médecines complémentaires à l’Université de Lausanne (Unil). «Cette unité, encore embryonnaire, a pour mission de jouer un rôle d’observatoire neutre sur l’ensemble des médecines complémentaires, sans préjugés, en se basant sur des études rigoureuses», explique Bertrand Graz, l’un de ses responsables.
Et ce spécialiste en santé publique de citer des études comparatives sur le mal de dos, où le yoga et l’ostéopathie apparaissent parfois utiles. Ou l’hypnose, déjà utilisée au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV), technique permettant de soulager les souffrances des grands brûlés et de raccourcir leur séjour hospitalier. Autre nouveauté apportée par cette unité: la mise en place de modules de cours obligatoires pour les étudiants en médecine de l’UNIL.
Pas de standard national
«Outre-Atlantique, où le gouvernement américain a investi près d’un milliard de dollars dans des recherches rigoureuses dans ce domaine, la plupart des grandes universités disposent d’un département en médecine complémentaire. Une approche pragmatique qui cherche à tirer parti du meilleur des deux mondes», ajoute Bernard Graz. Un volontarisme qu’est loin de partager la Suisse, qui compte pourtant 3000 médecins et 20 000 thérapeutes non médecins actifs dans quelque 200 méthodes de médecines complémentaires, alors que, pour ces derniers, il n’existe aucun standard national de formation.
Pour pallier ce manque, et surtout fournir des critères sur lesquels les assureurs peuvent s’appuyer lors des remboursements de prestations, des institutions comme la Fondation Asca ou le Registre de médecine empirique (RME) ont vu le jour.
Reste qu’il est difficile pour un patient de faire le tri entre les charlatans et les bons thérapeutes. Idem quant aux choix des médicaments «naturels» vendus sans ordonnance, qui ne bénéficient de loin pas tous d’une homologation de Swissmedic. De quoi faire proliférer le marché noir, estime l’Association suisse pour les médicaments de la médecine complémentaire, notamment dans le domaine des compléments alimentaires.
AGIR
SOUTENEZ NOS ENQUÊTES. ON S'OCCUPE DU RESTE.
Preuves à l'appui, la FRC provoque des changements concrets. Faites un don.


Continuer ma lecture

Poker Menteur
Prouvé par la science: vraiment?
«Testé dermatologiquement», «recommandé par les dentistes», «efficace 48 h»: les termes et les chiffres impressionnent ou rassurent. Que valent ces promesses sous leur vernis scientifique ? La FRC a envoyé ses enquêteurs de terrain partout en Suisse romande.
06 mai 2025 Communication trompeuse
High tech
Le comparatif des casques audio
Le marché des casques audio se partage entre des produits de marques spécialisées (Bose, Sennheiser, JBL...) et ceux de références polyvalentes, toujours plus nombreuses. La fourchette de prix est très large, allant de 50 à… 450 francs!
05 juin 2025
Perspective
«Depuis des mois, on a à lutter contre de forts vents contraires»
Restrictions budgétaires fédérales, institutions de contrôle fragilisées, cadre légal mis à mal. Les exemples où la voix des consommateurs est oubliée ne manquent pas. Entretien avec Sophie Michaud Gigon, dirigeante de la FRC.
06 mai 2025