Santé
Comparatif des prix en EMS: Monsieur Prix dénonce les écarts
Archive · 29 janvier 2019
Le vieillissement est un indicateur ambigu. D’une part, il est un marqueur positif de la qualité de vie générale d’une société. D’autre part, il implique une organisation et des moyens qui s’avèrent toujours plus exigeants à mesure que l’on monte dans la pyramide des âges. Les établissements médico-sociaux (EMS) constituent en Suisse le modèle type de prise en charge, en particulier lorsque les personnes âgées perdent leur discernement ou requièrent des soins aigus.
Répartition des coûts
Comme toute prestation médicale ordinaire, cette prise en charge est financée conjointement par les cantons, les assureurs et les résidents. Ces derniers assument une part des soins, le coût des charges immobilières et les frais socio-hôteliers. Ceux-ci comprennent le logement, l’alimentation, l’administration, le blanchissage et l’animation. Il est important de préciser qu’une part du prix de ces prestations est liée au lieu d’implantation de l’EMS, à l’état de son marché immobilier et au niveau des salaires.
Aides cantonales
Les résidents doivent assumer ces coûts dès lors que le montant de leur retraite couvre les montants facturés et/ou qu’ils disposent d’une fortune excédant 37 500 fr. pour un individu et 60 000 fr. pour un couple. Leur descendance est tenue d’assumer ces frais sur la part de fortune que leurs parents leur auront léguée de leur vivant. Si les résidents n’ont pas ces rentrées ou l’épargne suffisante, ils peuvent demander une aide via les prestations complémentaires.
Une part importante des frais assumés directement par les résidents tient donc aux prestations hôtelières (ou frais de pension). C’est précisément là-dessus que s’est penché Monsieur Prix. Il a passé au crible la facturation de près de 1417 EMS (sur 1552 répertoriés en Suisse). Il a notamment constaté que plus les soins étaient importants, plus les tarifs hôteliers avaient tendance à être élevés. De la même manière, les frais de pension ont tendance à monter là où le personnel soignant est nombreux. Ainsi, selon Monsieur Prix, tout laisse à penser qu’une partie des montants dédiés à l’hôtelier sert, dans certains cantons, à assumer une partie des soins. En principe, un tel croisement n’est pas autorisé par la loi.
L’existence de ce financement croisé n’étonne pourtant pas Camille-Angelo Aglione, secrétaire romand de Curaviva Suisse (faîtière des EMS) puisque les pouvoirs publics et les assureurs se rejettent mutuellement la responsabilité d’une partie des coûts résiduels des soins (montants qui dépassent les forfaits fédéraux de participation de l’assuré et de l’assurance-maladie). L’association dénonce cette situation depuis plusieurs années. En avril 2018 dans la Tribune de Genève, le conseiller d’Etat genevois Mauro Poggia n’hésitait pourtant pas à assumer ouvertement un tel bricolage qui permet de couvrir l’ensemble des dépenses de soins.
Transparence attendue
De son côté, Fabrice Ghelfi, directeur général de la cohésion sociale du canton de Vaud, ne s’offense pas de ce financement croisé dans la mesure où il reste modéré. Ce dernier offre, selon lui, la souplesse nécessaire à la bonne exploitation des EMS prévoyant une prise en charge globale des résidents. Fabrice Ghelfi rappelle, en outre, que les cantons revendiquent une hausse de la contribution des assureurs. Celleci n’a pas évolué depuis 2011 et son augmentation pourrait atténuer ce financement croisé. L’OFSP prévoit de l’augmenter de 6,7% et d’abaisser de 3,6% la contribution aux soins des EMS. Cette mesure a été jugée insuffisante par Curaviva.
Si ce financement croisé permet donc aux EMS de répondre aux besoins et aux soins qu’exigent leurs pensionnaires – particulièrement aigus en psychogériatrie – il pose un problème de transparence pour les consommateurs. En effet, dans un système de santé où la part des assurés est déjà la plus haute des pays de l’OCDE, il serait bon que toute ponction supplémentaire, à défaut d’être empêchée, soit au moins annoncée.
En l’état, un résident ou ses proches ne savent pas quelle part du montant payé pour assurer les frais hôteliers sert dans les faits à couvrir des soins. Il faudrait au moins leur livrer cette information. Les projections démographiques – l’Office fédéral de la statistique prévoit qu’une personne sur quatre en Suisse sera âgée de plus de 64 ans en 2045 – nous indiquent que le problème ne se résoudra en tout cas pas de lui-même. A défaut, il s’aggravera.
Cet article est paru dans FRC Mieux choisir sous le titre «Facturation en EMS: monsieur Prix explore une zone grise»
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