Des conditions modifiées unilatéralement par l’assureur
Cette disposition (Art. 35 P-LCA) constitue le point le plus inquiétant de cette révision législative. Elle permettrait aux entreprises d’assurance de modifier unilatéralement les conditions générales moyennant une information notifiée suffisamment à l’avance au preneur d’assurance et la possibilité pour ce dernier de résilier le contrat. Cet article crée un déséquilibre révoltant entre les parties, comme le démontre le simple fait que personne n’envisagerait d’accorder un droit similaire à l’assuré – et ouvre également la voie à une précarisation de sa situation.
En effet, si cette disposition devait entrer en force, les assurances pourraient modifier comme elles l’entendent leurs conditions. Il ne resterait alors au client mécontent des changements qui lui sont imposés que son droit de résiliation. Or, l’introduction d’un droit de résilier est vide de toute portée pratique. Dans beaucoup de cas, l’assuré ne prêtera pas attention à temps aux modifications imposées ou se trouvera au contraire forcé de les accepter.
Le cas est particulièrement problématique avec les assurances maladie complémentaires ou perte de gains, où le preneur d’assurance pourrait se voir contraint d’accepter la modification des conditions du contrat. On pense surtout aux personnes âgées ou aux autres «mauvais risques», qui ont très peu de chance d’être acceptés par une nouvelle compagnie.
Cette modification est d’autant plus choquante qu’elle a été introduite suite à la proposition d’adopter un article diamétralement opposé, qui visait à interdire les clauses contractuelles par lesquelles les assurances se réservaient le droit de modifier unilatéralement les conditions générales.
La FRC demande à ce que la modification unilatérale des conditions d’assurance par l’assureur soit interdite.
Un droit de résiliation dangereux
L’introduction d’un droit de résiliation ordinaire (art. 35a P-LCA) au terme de la troisième année de contrat semble, de prime abord, être une bonne chose. Elle permettrait en effet de réagir aux changements dans l’environnement concurrentiel des assurances et de réaliser des économies en concluant une nouvelle police.
Toutefois, ce droit ouvre également la porte à plusieurs problèmes s’agissant des contrats d’assurance privés conclus pour une longue période. On peut penser aux indemnités journalières pour maladie, mais aussi encore une fois au cas de l’assurance-maladie complémentaire, qui permet aux consommateurs de se prémunir contre le mauvais risque futur qu’ils pourraient représenter, ou encore aux assurances pertes de gains, protégeant les indépendants en cas d’accident ou de maladie.
Dans ces cas, la résiliation ordinaire par la compagnie d’assurance n’est pas souhaitable et vide de son sens le contrat en question. La FRC souhaite donc qu’une exception soit introduite dans la loi pour ces assurances envisagées «pour l’avenir».
De manière plus générale, elle estime qu’un régime spécial devrait être réservé dans la loi s’agissant de la résiliation de ces prestations envisagées sur la durée. En effet, dans la mesure où les assureurs maladie complémentaire se targuent déjà de renoncer à leur droit de résilier le contrat d’assurance dans leurs conditions générales, notamment en cas de dommage partiel (article 42 LCA), la FRC estime qu’il convient de régler ce point une bonne fois pour toute dans la loi, afin de garantir la sécurité des assurés.
À l’assuré de prouver son innocence
La modification de l’article 45 P-LCA prévoit que l’assuré peut être sanctionné s’il viole l’une de ses obligations, à moins que ce dernier parvienne à démontrer que le dommage aurait eu la même ampleur s’il avait agi conformément aux attentes de l’assurance.
En d’autres termes, cette modification pose la présomption, au bénéfice de l’assurance, qu’il existe un lien de causalité entre la violation et le dommage et il reviendra à l’assuré de démontrer le contraire. Ce dernier est à nouveau mis en position de faiblesse. Il est bien plus difficile de prouver qu’un fait n’a pas eu d’incidence que de prouver qu’il en a eu une. Autant dire qu’une telle preuve est extrêmement difficile à apporter et on ne peut que se demander si le but ne serait pas de compliquer la tâche aux assurés, permettant ainsi aux assurances de refuser leurs prestations.
Cette disposition va à l’encontre des règles générales du droit des obligations, où l’existence du lien de causalité doit être apportée par la partie qui l’allègue. Il doit donc revenir à l’assurance de démontrer que le comportement de l’assuré a aggravé le dommage pour lui refuser, le cas échéant, ses prestations.
Une couverture qui peut disparaître au pire moment
La proposition d’introduire l’article 35d AP-LCA faisait suite à un cas porté devant le Tribunal fédéral. Une assurance s’était réservé contractuellement la possibilité d’interrompre ses prestations après l’expiration du contrat. Le Tribunal fédéral (ATF 135 III 225) avait invalidé cette clause, la jugeant insolite et estimant que l’attention de l’assuré aurait dû être portée expressément dessus.
L’article 35d AP-LCA avait pour but d’interdire purement et simplement une telle clause dans les contrats. La FRC soutient qu’une assurance doit fournir les prestations auxquelles elle s’est engagée contractuellement même après l’expiration du contrat si l’évènement assuré a eu lieu pendant la durée du contrat. Par conséquent, il convient de réintroduire cette interdiction dans la loi.