Produit décongelé: une information essentielle trop souvent invisible

Un client, alléché par une viande ou un poisson en action, l’achète, peut-être dans l’idée de constituer un stock au congélateur. À la maison, c’est la désillusion: au dos de l’emballage, il est écrit en tout petits caractères que le produit a été décongelé. L’histoire est connue, preuve en est le nombre de témoignages agacés ou surpris que la FRC reçoit. «Je pensais que la viande fraîche l’était vraiment, comme probablement beaucoup de clients. […] Ce n’est pas visible […]. Le consommateur galère!» explique une consommatrice.

La pratique est légale et énerve prodigieusement la FRC depuis de nombreuses années. En effet, il suffit que cette mention difficilement repérable sur l’étiquette figure quelque part, il n’est pas nécessaire qu’elle se distingue en termes de taille ou de police de caractères des autres indications. Or elle peut conduire à une décision d’achat biaisée.

D’abord, la qualité d’un article décongelé n’est pas forcément la même: il relâche souvent beaucoup plus d’eau à la cuisson qu’un produit frais. Ensuite, des effets sur la santé sont susceptibles d’intervenir si l’on rate l’information et que l’on recongèle le produit. «Les étapes de congélation-décongélation augmentent le risque de prolifération bactérienne, jusqu’à être dangereuse. Les atteintes sont principalement d’ordre gastro-intestinal. Généralement bénignes pour les personnes en bonne santé, elles peuvent être beaucoup plus problématiques pour les personnes à risque comme les seniors, les enfants ou les gens déjà atteints dans leur santé», explique Patrick Edder, Chimiste cantonal genevois.

Pour cette enquête, la FRC a envoyé ses clients mystères dans les enseignes Coop, Manor, Migros, Denner, Aldi, Lidl et Aligro. Ils ont examiné les emballages de viande, poisson et fruits de mer en action dans 43 magasins des cantons de Fribourg, Genève, Jura, Neuchâtel, Valais et Vaud en début d’année.

Lecture difficile sans harmonisation

Au final, toutes les enseignes vendent des produits décongelés, et ce, de manière totalement aléatoire. Impossible de savoir si un type de produits est davantage concerné qu’un autre ou d’identifier si un distributeur a une manière particulière d’indiquer l’information. Il n’y a aucune harmonisation en la matière, ce qui rend la lecture encore plus compliquée. De plus, la FRC a systématiquement trouvé au moins un article décongelé (parmi les produits frais) en action lors du passage en magasin.

Les enquêteurs ont identifié que l’indication figure la plupart du temps au dos de l’emballage. Dans le meilleur des cas, en première ligne, en gras, dans les termes «décongelé» ou «produit décongelé, ne pas recongeler». Dans le pire des cas, elle est noyée parmi les autres informations, avec la même police de caractères, au milieu d’un texte uniforme, parfois même en toute fin, après de nombreuses indications et le tableau des valeurs nutritionnelles. Une chose est sûre, elle ne se détecte pas au premier coup d’œil.

Pour une information lisible et claire

La FRC déplore que la clientèle doive se transformer en détective pour dénicher une information aussi essentielle que la fraîcheur d’un produit. La manière de faire est non seulement trompeuse mais elle entraîne des risques sanitaires et un potentiel gaspillage alimentaire. Au vu du nombre important de produits concernés, la FRC prendra des mesures auprès des autorités et des distributeurs pour que cette information essentielle soit standardisée: la mention doit absolument être indiquée de manière lisible et compréhensible à l’avant du paquet afin que les clients disposent de toutes les indications nécessaires et puissent ainsi effectuer un choix éclairé. Notre association partage l’avis du Chimiste cantonal genevois, qui estime qu’«il serait également utile, à des fins de prévention, de rajouter la mention «ne pas recongeler».

Résultats par enseigne