Insomnie

Benzodiazépines: amis… mais surtout pas pour la vie!

Ces stupéfiants peuvent constituer une réponse adéquate à une insomnie passagère. Mais ils doivent être prescrits avec prudence et consommés sous contrôle médical.
Santé Médicaments

Archive · 05 juin 2012

Les troubles du sommeil, surtout dus à l’anxiété et au stress, sont des phénomènes fréquents dans les pays industrialisés, où la course à la performance est devenue une norme. Et le recours aux somnifères ou aux tranquillisants se banalise. Mais la Suisse manque de données permettant d’en mesurer précisément l’ampleur. L’Enquête suisse sur la santé 2007 nous apprend seulement que leur consommation augmente avec l’âge, passant de 5,4% de la population chez les 35-44 ans à 18,2% chez les 65-74 ans, et même davantage après 75 ans.

Or ces produits ne sont pas anodins. Les benzodiazépines sont des anxiolytiques vendus sur ordonnance, dont les plus répandus sont le Seresta, le Lexotanil, l’Imovane et le Stilnox. Leur efficacité est réelle, mais ils induisent, en quelques semaines seulement, un état de dépendance.

Aide ponctuelle

Pour Laurent Médioni, pharmacien cantonal à Fribourg, «ces produits ne posent pas de problème pour autant qu’ils soient utilisés comme une aide ponctuelle, dans les limites des doses officielles, pour une courte durée et avec une thérapie de soutien.» L’Ordonnance sur le contrôle des stupéfiants limite à six mois la durée de validité totale des ordonnances de benzodiazépines. Mais une étude fribourgeoise menée en 2011 démontre que trois quarts de leurs utilisateurs en prennent depuis plus de six mois! En d’autres termes, la dépendance serait un phénomène extrêmement répandu.

Comment expliquer dès lors que les médecins, souvent généralistes, prescrivent ces produits trop longtemps? Pour Jean-Félix Savary, secrétaire général du Groupement romand d’études des addictions (GREA), cela s’expliquerait par le matraquage publicitaire des fabricants dans les cabinets. Un avis que ne partage pas François Héritier, président de la Société suisse de médecine générale, pour qui les médecins sont très bien informés des risques. Ceux-ci franchiraient donc, parfois, la ligne rouge en toute conscience? «Oui, admet-il, mais les conséquences dépendent des patients. Chez les personnes âgées, la dépendance est rarement considérée comme un problème, car elle est largement compensée par le mieux-être ressenti au quotidien grâce au médicament.»

Attention, sujet sensible

«Encore faut-il que le patient n’augmente pas les doses, car alors la situation devient problématique à tous les âges», répond Jacques de Haller, président de la FMH, faîtière des médecins. Les médecins doivent détecter s’ils n’ont pas affaire à un problème psychique plus grave, telle une dépression. «Une prise en charge psychothérapeutique, voire un passage aux antidépresseurs, devraient intervenir après trois ou quatre semaines de benzodiazépines pris sans succès.»

Mais, dans la pratique, c’est plus compliqué, nuance-t-il: «Insistance des patients, déni face à la dépression, prescription de facilité pour médecins pressés, effet stigmatisant des antidépresseurs, manque de psychiatres, etc., beaucoup d’éléments peuvent intervenir.» Qui n’ont rien à voir avec la rationalité scientifique exigée par la Loi fédérale sur les stupéfiants (LStup) au moment de la prescription.

Les pharmaciens et les médecins cantonaux, qui ont la responsabilité du commerce de ces produits sur leur territoire, alertent régulièrement leurs confrères sur les risques judiciaires encourus en cas de prescription et de remise irraisonnée de benzodiazépines. Et, dès la fin de 2012, chaque livraison de ces produits sera notifiée à Swissmedic. Quel usage l’institut compte-t-il faire de ces données? Silence radio. Les stupéfiants sont un sujet sensible.

Lire aussi l'article: Les pharmaciens peu réveillés face aux insomnies

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