8.9.2020
La réflexion de Sophie Michaud Gigon Secrétaire générale de la FRC
Disposer du droit à l’action collective est une de nos revendications majeures et prioritaires durant cette législature. Le Conseil fédéral en avait reconnu la nécessité en 2013 et élaboré un avant-projet de révision du Code de procédure civile. Signal positif, la majorité des cantons s’y était déclarée favorable. Economiesuisse, à l’inverse, avait sorti le drapeau rouge, par réflexe sans doute.
Pourtant, l’action collective que nous voulons est loin de la class action américaine. Un produit bien suisse, modeste, soupesé. Les consommateurs lésés ne pourront jamais en faire un modèle d’affaires – mais uniquement être indemnisés pour le dommage subi. D’autres outils empêcheront les actions téméraires, comme la prise en charge des frais de justice par la partie perdante ou l’examen du bien-fondé de l’action par le juge. La FRC soutient cette dernière proposition.
Dans les faits, seuls quelques cas d’ampleur seraient portés devant la justice par décennie. Le scandale des moteurs truqués VW en aurait fait partie. Celui de la Dépakine administrée aux femmes enceintes épileptiques malgré les risques de retard mental pour l’enfant, aussi. Tout comme l’obsolescence programmée d’un produit Apple, cas déjà traité en Italie et en France notamment.
L’accès à l’action collective est un droit légitime pour les consommateurs.
Sous l’impulsion de la Commission européenne, plusieurs Etats ont intégré l’action collective dans leur législation. L’étape suivante, qui a recueilli un accord de principe dans l’UE, consiste à l’introduire au niveau européen. Un citoyen membre de l’UE pourra donc se retourner contre une entreprise helvétique, mais les Suisses, eux, resteront pieds et poings liés. Un comble!
La FRC compte surtout sur l’effet dissuasif d’une telle disposition dans l’appareil législatif. Les entreprises doivent savoir que le droit des consommateurs ne se viole pas impunément. Un individu seul n’ira pas au combat aisément, cela requiert de l’énergie, de l’argent, des compétences personnelles. Il bénéficiera en revanche de la force du collectif si la FRC, ou toute autre organisation similaire, peut actionner cet instrument. Par ailleurs, instruire une action pour un même litige plutôt que de multiplier les cas ouverts déchargera aussi les tribunaux, déjà sous l’eau.
Devant tant de bon sens et de pondération, quelle n’a pas été notre surprise lorsque a été publiée la proposition de révision finale pour débuter le travail parlementaire: l’action collective avait purement et simplement été rayée de l’ordre du jour! Le 3 septembre, la commission juridique des Etats s’est mise au travail. Pour la FRC, il s’agit donc d’informer les parlementaires, de sensibiliser l’opinion publique, de convaincre les PME, de rassurer, de trouver nos alliés et de définir la meilleure tactique pour faire avancer cette noble cause. En fait, il s’agit «juste» d’obtenir le droit élémentaire d’unir nos forces pour nous défendre.