2.2.2016
Coûteuses, bourrées de chimie, de colorants et d’arômes artificiels… Les tablettes en vente libre restent en travers de la gorge.
L’angine, dite aussi «pharyngite», fait, hélas, partie des hits de l’hiver! Dans environ 90% des cas, cette inflammation du pharynx est d’origine virale. Bégnine, elle ne se soigne donc pas. Aussi douloureuse soit-elle, il faut simplement attendre qu’elle passe. Pourtant, les pharmacies vendent – à prix d’or, de 40 à 90 centimes la pièce – des tablettes à sucer se disant efficaces «contre les maux de gorge». Quelles substances ces produits promus à grand renfort de campagnes publicitaires contiennent-ils et quel est l’avis du corps médical? Pour le savoir, nous avons scruté à la loupe les compositions de dix d’entre eux, et soumis leurs formules à l’oeil expert du Service de pharmacologie et toxicologie des Hôpitaux universitaires genevois (HUG).
Parmi les ingrédients entrant dans la composition de Mebu-lemon et de Mebucaïne (Novartis): la tyrothricine, un antibiotique. Sa présence soulève deux problèmes, à commencer par… son inutilité, puisque les angines virales – 9 cas sur 10 – ne nécessitent aucun traitement! Deuzio, elle contribue à alimenter un autre fléau majeur, la suringestion d’antibiotiques, l’une des causes de l’antibiorésistance développée par certaines bactéries. Interpellé par la FRC, GSK Healthcare, responsable des médicaments en vente libre de Novartis, fait la sourde oreille, sous prétexte que «les autorités suisses de la santé n’ont émis à ce jour aucune directive sur l’application de la tyrothricine dans les produits contre les maux de gorge». Une attitude que la FRC juge irresponsable en termes de santé publique.
Toutes les pastilles, à l’exception de Strepsils Dolo, contiennent par ailleurs des antiseptiques, tout aussi inutiles mais dont l’impact sur la santé est moindre. Elles recèlent aussi des anesthésiques ou anti-inflammatoires dont le rôle est d’atténuer la douleur localement, par contact direct. Selon les HUG, «ces traitements sont moins efficaces que l’ingestion d’antidouleurs ou n’ont pas démontré leur efficacité.» (Lire encadré.)
Orange, jaune, ou carmin… Les couleurs solaires de ces «bonbons» parfumés aux agrumes ne viennent, malheureusement, pas du zeste, mais de colorants azoïques, décriés pour leurs effets allergisants et leur rôle dans le développement de l’hyperactivité infantile. La moitié des échantillons sont ainsi concernés, soit Mebu-lemon, Strepsils miel citron, Lidazon citron, Neoangin, et même dans sa version junior. Entre la présence de substances actives et d’additifs douteux, rien ne sauve ces tablettes. D’autant que les experts s’accordent à dire qu’«aucune directive médicale n’en recommande la prescription». En clair, ne vous ruinez pas davantage la santé, évitez-les!
En revanche, les angines bactériennes nécessitent une prescription médicale. Le frottis de contrôle – un prélèvement donnant un résultat en quelques minutes à peine – peut toutefois se faire dans les pharmacies netCare (liste sur pharmasuisse.org) par une personne formée à cet effet. Un test qui, s’il s’avère négatif, évitera une visite chez le médecin et économisera du temps et de l’argent.
Voir les résultats du test des pastilles pour la gorge
Combattre les traitements inutiles, lutter contre l’usage inconsidéré des antibiotiques? Notre dossier.