17.1.2023, Laurence Julliard et Sandra Imsand
Depuis le début de l’année, Alda Breitenmoser est la nouvelle présidente de l’Association des Chimistes cantonaux de Suisse (ACCS). Il s’agit de la première femme à la tête de cette institution fondée en 1909. L’Argovienne a à cœur d’approfondir la collaboration entre les cantons pour lutter contre les fraudes.
Qu’implique votre nouvelle casquette de présidente de l’ACCS?
Je représente l’association dans les différents organes de la Confédération. Les quatre autres membres du comité me soutiennent dans cette tâche.
Comment concilier cette fonction avec votre activité comme chimiste cantonale en Argovie?
Dans mon office, il y a des suppléants pour tous les domaines, je peux déléguer certaines affaires internes. Cela facilite l’exercice de ma fonction de présidente.
De l’alimentation au jouet, le champ d’activités des Chimistes cantonaux est vaste! Comment s’organise un service pour couvrir tous ces thèmes?
Pour un contrôle efficace, il est important que l’inspecteur ait une bonne connaissance du domaine. C’est pourquoi ces personnes sont issues de professions très diverses. De plus, l’échange régulier à l’interne du service et la formation continue sont importants pour se familiariser avec les nouvelles technologies et les systèmes de distribution les plus récents. Pour certaines thématiques spécifiques, comme le contrôle des emballages, les spécialistes d’un canton sont amenés à effectuer des contrôles dans d’autres régions. Il en va de même pour les personnes travaillant dans les laboratoires.
«Les denrées périssables comportent plus de risques. Raison pour laquelle elles sont analysées plus fréquemment.»
Comment décidez-vous des thématiques traitées?
La législation définit la fréquence des inspections par catégories d’établissements. Ainsi, les restaurants doivent être inspectés au moins tous les deux ans. Dans le domaine de l’analyse, il n’existe pas de prescriptions minimales. Le risque que peut comporter un produit influence la décision de procéder à une analyse. Les denrées périssables sont ainsi analysées plus fréquemment. La faîtière de l’ACCS veille à ce que les inspections et examens soient effectués selon les mêmes principes dans tous les cantons.
Certains secteurs demandent-ils une vigilance accrue?
Dans la mesure où la branche alimentaire lance continuellement de nouveaux produits, les problématiques évoluent d’année en année. Pour choisir les campagnes d’analyse, les services cantonaux se basent notamment sur les résultats du système européen d’alerte rapide pour les denrées humaines et les aliments pour animaux (RASFF), sur les publications de nos homologues à l’étranger, mais aussi sur les produits problématiques lors d’analyses des années précédentes.
Les commissions Inspection et Contrôle des produits de l’ACCS coordonnent chaque année une campagne nationale qui traite de questions actuelles et pertinentes. Ainsi, en 2021, les Chimistes cantonaux ont examiné la mise en œuvre de l’autocontrôle en ce qui concerne la présence de la bactérie Listeria monocytogenes dans les entreprises de transformation des denrées. Puis ils ont analysé les joints de couvercles de bocaux de produits huileux; il était là question de transfert de plastifiants du contenant aux aliments.
«Les analyses ont révélé des contaminations de plastique dans les bocaux de pesto, tomates séchées, etc. Certains joints en PVC sont inadaptés.»
Pourquoi ne pas dénoncer nommément les entreprises ou produits incriminés lors de vos publications?
Parce que les personnes chargées de l’application de la législation sont soumises à une obligation de discrétion. Toutefois, si des produits dangereux pour la santé ont été remis à la population, nous fournissons ces informations dans le cadre de l’avertissement public.
Y a-t-il des amendes, des mesures dissuasives?
Dans le cas de manquements qui ont donné lieu à des contestations, le contrôle cantonal des denrées perçoit un émolument pour les frais qu’il a engagés. Mais ce n’est pas une amende. Les Chimistes cantonaux font usage d’amendes ou de plaintes pénales lorsqu’ils constatent des manquements graves et répétés, par exemple lorsqu’une entreprise ne parvient pas à maîtriser son processus de fabrication et que des germes fécaux sont détectés à plusieurs reprises dans les produits.
L’industrie est tenue d’opérer un autocontrôle… Malheureusement, on découvre des fraudes tous les jours. N’est-ce pas une posture un peu trop confiante?
L’autocontrôle que les entreprises doivent effectuer est une base importante de la législation. Elle a pour effet que les contrôles du Chimiste cantonal ne sont pas effectués de manière permanente et intégrale, mais en fonction des risques. Dans ce système de contrôle par échantillonnage, il est inévitable que l’un ou l’autre défaut ne soit pas découvert.